30 janvier 2009

"L'ordre règne à Genève"








"Engage-toi, réengage-toi !"

Nouvel hymne à la jeunesse rebelle du monde entier extrait du prochain album de Bérurier Noir.


N.B: l'article qui suit a été rédigé le 01.02.09

Le Conseil d'Etat de "gauche" à la solde de la droite croyait pouvoir décourager la gauche radicale de manifester contre le WEF en interdisant au dernier moment (alors que la coordination s'est montrée irreprochable dans ses négociations avec la police) la manifestation prévue pour le samedi 31 janvier. Pas de chance! Non seulement aucune organisation signataire de l'appel à la manifestation ne s'est désistée, mais solidaritéS et les syndicats (d'abord hésitants) s'y sont joints, ainsi que de nombreuses personnes non-membres des organisations en question mais attachées aux droits démocratiques: entre 1000 et 2000 au total. Le rassemblement avec prises de parole s'est très bien déroulé, les manifestants sont jusqu'au bout restés pacifiques, à écouter les discours au contenu clairement révolutionnaire: Jean-Luc Ardite, président du PdT, a rappelé l'alternative "socialisme ou barbarie", le célèbre sociologue socialiste de gauche Jean Ziegler a parlé d'une montée du fascisme à propos de l'interdiction de la manifestation.

Or cela, la police ne voulait pas l'accepter! Désireux de criminaliser toute contestation de l'ordre établi et voyant que les manifestants ne lui en donnaient pas le prétexte, le gouvernement genevois donna à sa police l'ordre de créer ce prétexte. Ce qui fut fait. Une partie des manifestants voulut défiler pacifiquement malgré l'interdiction, en parlementant d'abord avec la police; on les laissa marcher quelques mètres, puis la police les attaqua sans la moindre raison avec un tir de barrage de grenades lacrymogènes et des balles en caoutchouc, les forçants à refluer vers la Rue du Mont-Blanc. Auparavant, la police avait donné l'ordre aux manifestants de se disperser, tout en blocant les passages presque complètement, si bien que les gens ne pouvaient passer qu'au compte-gouttes, soit-disant pour garantir "l'ordre public". Or dès le jet des premières grenades, la police mit son plan à exécution: les passages furent totalement bloqués, laissants des dizaines de manifestants qui n'avaient pas eu le temps de se disperser, ainsi que de simples badauds pris au piège. J'étais resté avec quelques camarades afin de s'assurer que tous les membres présent du Parti quitteraient les lieux sains et saufs. Au moment des faits, je me trouvais sur l'esplanade d'où les discours avaient été prononcés, ce qui me donnait une vue surplombante. Depuis là, j'ai respiré du gaz lacrymogène jusqu'à l'overdose et j'ai pu voire de mes yeux toutes les exactions de la police: de ce que j'écris, je n'ai rien inventé, je me borne à relater les faits dont j'ai été le témoin oculaire.

Pendant des heures, les keufs déguisés pour l'occasion en infanterie lourde des temps jadis ont retenus en otage près d'une centaine de personnes, sans la moindre raison, refusant de parlementer et allant jusqu'à menacer de "coups de matraque dans les jambes" ceux qui s'y risqueraient. Or cela était de la provoc tout à fait classique: en effet les manifestants qui restaient, pour la plupart des jeunes aux intentions pacifiques (certains étaient venus par solidarité avec le peuple palestinien), surtout les plus nerveux ou ceux qui sont un peu claustrophobes, ne pouvaient que céder à l'insoutenable pression. Jeter des canettes ou des bouteilles de bière sur les flics était une réaction parfaitement naturelle. Par son attitude arrogante et autiste, la police a prouvé que cette réaction elle la voulait. A ces quelques jets, qui pouvaient tout au plus tacher de bière un uniforme (grave crime s'il en est!), la police répliqua, de façon scandaleusement disproportionnée, par le jet de dizaines de grenades lacrymogènes dans le tas, faisant fi de la santé des personnes présentes. Certains en ont pourtant eu des malaises, un jeune dut même être hospitalisé. Pourquoi une telle disproportion? Encore de la provoc! Les centaines de manifestants qui étaient déjà sortis de l'encerclement furent naturellement portés à venir au secours de leurs camarades pris au piège, à user de leur droit de légitime défense. Alors, la police put vraiment se déchaîner dans une répression hallucinante: grenades lacrymogènes, balles de caoutchouc, camions avec des jets d'eau, le tout ressemblait plus à la reconstruction d'un combat de rue qu'à une opération de police. Des policiers jetèrent même des grenades lacrymogènes à l'intérieur de la Manor, contaminant la ventilation! Certes, après d'âpres négociations avec ATTAC, la police accepta de laissa sortir les membres de certaines organisations (dont le PdT), mais dans l'arbitraire le plus total, refusant ce droit à la plupart pour simple délit de faciès... ou délit de port du foulard!

Pourquoi une telle répression sauvage? Les faits ont démontré (si toutefois cela n'était pas évident!) que le prétexte officiel que sont les "casseurs" ne tient pas la route. Bilan des dégâts: quelques papiers et bouteilles par terre, le contenu d'une poubelle brûlé (il l'aurait de toute façon été aux Chenevriers), une caissette de 20minutes renversée... par contre le prix de la répression est de 1,2 millions, au frais du contribuable! Invoquer une affiche hyper symbolique et stylisée, avec notamment un fond de flammes, était d'un ridicule sans nom, comme si les manifestants sont une horde de barbares venus brûler Genève (est-ce pour cela que les flics se déguisent en légionaires romains?) Il n'existe rien de tel que le black block, et aucun casseur n'était présent à la manifestation... ou plutôt si: le "blue block", les sbires de Moutinot! Par contre, interdire une manifestation sous prétexte que quelques insignifiants dégâts matériels pourraient en résulter est d'une gravité extrême, cela revient à remettre en cause un droit démocratique fondamental! Alors pourquoi le "socialiste" Moutinot prit une décision d'une telle gravité?

Cela devient plus clair si l'on songe à l'objet de la manifestation: le World Economical Forum de Davos. Car qu'est que le WEF? C'est tout simplement la réunion des représentantants des grandes multinationales (il faut avoir un chiffre d'affaires de 5 milliards de dollars annuel pour en être membre), le conclave des princes de la finance et des chefs des Etats bourgeois à leur solde qui cette année se sont réunis pour se mettre d'accord de comment construire le "monde d'après crise", c'est-à-dire de comment nous faire payer leur crise. S'il y a des "casseurs", c'est à Davos qu'ils se réunissent, légalement et sous la protection de l'armée suisse: en effet les seigneur du capital sont responsables de millions de morts, de centaines de millions de vies brisées, d'océans de sang et de larmes. En somme, le WEF est le meilleur exemple de la démocratie censitaire poussée jusqu'à l'absurde, voire d'un nouvel avatar du féodalisme, les potentats qui décident de la politique mondiale dans leur intérêt exclusif et dans le mépris le plus total de l'avis de leurs peuples! Or nous n'acceptons pas leur domination et de leur monde nous n'en voulons pas! Ce que nous souhaitons nous c'est construire l'après-capitalisme, leur arracher le pouvoir et la richesse qui revient de droit aux peuples pour rompre avec leur tyrannie et construire sans eux un autre monde.

Or la bourgeoisie, dont la droite mais aussi la pseudo-gauche modérée est le bras politique, se sentant affaiblie par la crise, honnie par les masses qu'elle exploite impunément, ne veut pas entendre parler de la contestation par laquelle elle se sent menacée: en effet les travailleurs ont toutes les raisons du monde de se révolter, de briser leurs chaînes et de renverser leurs oppresseurs. C'est pourquoi, pour sauver son pouvoir affaiblie par la crise, la bourgeoisie est aujourd'hui décidée de suivre la même voie que ses ancêtres en 1929: liquider la démocratie bourgeoise pour éliminer physiquement toute opposition et mettre à la place une dictature néo-fasciste. C'est pourquoi, quand Jean Ziegler parla de "montée du fascisme", il n'avait que trop raison. Pour éviter que le peuple ne se lève à la défense de ses libertés chèrement acquises, la bourgeoisie le noie, par l'intermédiaire de ses médias, sous une propagande mensongère, invoquant toujours sous forme de délire paranoïaque le même prétexte pour supprimer la liberté: la sécurité. Cette fascisation rempante prend aujourd'hui des proportions terrifiantes: caméras de sécurité, fichage des manifestants, criminalisation de toute contestation, suppression de l'habeas corpus (un droit acquis par la révolution bourgeoise anglaise de 1649!), arrestations "préventives" (c'est-à-dire arbitraires), documents biométriques, Guantanamo, torture, Patriot Act... la liste est très, très longue!

Et c'est au service de cette politique que c'est mis le conseiller d'Etat socialiste Laurent Moutinot, c'est cette politique que promeuvent Pierre Weiss et Eric Stauffer. Sur le site de M. Moutinot, les pages "droit des personnes" et "sécurité et dignité" sont "en construction"... en effet, il y a du travail! S'il voulait être honnête envers ses électeurs, Moutinot devrait soit démissionner, soit adhérer à l'UDC! En effet, en quoi son bilan est il de gauche? Ministre des travaux publics: le peuple n'a guère vu les logements sociaux qu'il était sensé faire construire. Ministre des institutions: répression sauvage des mendiants roms (on n'osait pas en faire autant au Moyen Age!), défense du centre Frambois pour la détention de réquérents d'asyle déboutés qu'Amnesty international avait jugé contraire aux droits de l'homme, enfin répression sauvage d'une manifestation de gauche. Mais ce n'est pas la première fois que les socio-démocrates jouent le rôle de garde-chiourme du capitalisme. Au sortir de la Première Guerre mondiale, la bourgeoisie allemande donna le pouvoir au parti social-démocrate (SPD) afin qu'il écrase dans le sang la révolution spartakiste, c'est le notable du SPD Noske qui ordonna froidement d'assassiner Rosa Luxemenbourg et Karl Liebknecht. Après cela, le Parti communiste (KPD) jeta à la face des traîtres du SPD, bourreaux de la classe ouvrière, le slogan de "socio-traîtres". La "gauche non-communiste", ainsi que certains opportunistes du mouvement communiste, accusèrent et continuent d'accuser le KPD de secrtarisme et de stalinisme pour ce slogan. Or la prtique politique démontre que les socio-démocrates étaient et restent des socio-traîtres, et que c'est le SPD qui par sa trahison de la classe ouvrière ouvrit la route du pouvoir à Hitler. Il ne faudrait certes pas étendre ce jugement à tous les membres du PS genevois, il compte encore dans ses rangs une aile gauche, voire même une minorité (très réduite) qui est pour le socialisme. Mais, dans l'interview qu'elles ont donné au Gauchebdo de cette semaine, les trois candidates à la candidature socialistes pour le Conseil d'Etat ont approuvé la décision de leur collègue; on peut en déduire qu'une candidate qui soit vraiment de gauche n'aurait aucune chance d'être adoubée par les militants. CQFD!
Et qui sont ils, bourgeois et socio-traîtres, pour critiquer Staline? Non pas qu'il ne soit digne d'être durement critiqué, mais en quoi sont-ils meilleurs que lui? De quelle démocratie parlent-ils? Démocratie des lacrymos et des matraques! J'avais envie à certains moments de demander l'asyle politique à la Corée du Nord pour échapper à leur démocratie! En fait, démocratie bourgeoise signifie simplement démocratie pour les bourgeois et dictature pour les autres. Par contre, s'ils n'aiment pas Staline, c'est peut-être parce qu'il a dit des choses très justes et subversives pour leur régime. Par exemple dans ce qui fut en quelque sorte son testament politique, au 19e congrès du PCUS, en 1952, un an avant sa mort: "Autrefois la bourgeoisie se permettait d'être libérale (au sens de libéralisme politique, ndr.). Aujourd'hui du libéralisme il ne reste aucune trace. La bannière des libertés démocratiques bourgeoises est jetée par dessus-bord. Et c'est vous, Partis communistes, qui devez la relever parce qu'à part vous personne ne peut la relever". Hé bien oui, cette bannière nous la relèverons et nous la porteront haut, sans eux et contre eux. Nous ne plieront pas genou face à la droite fascisant et son Etat, nous lutterons jusqu'au bout contre son arbitraire, jusqu'au renversement de nos bourreaux. Du reste, ce combat n'est ni perdu d'avance ni même si dangereux. La bourgeoisie n'est forte que lorsque les masses sont désunies par la peur, sitôt qu'elles se lèvent son pouvoir s'évanouit. Au Brésil, à Bélem, pour le Forum Social Mondial, des centaines de milliers de personnes ont défilé dans la rue sans aucun obstacle de la part de la police. En France, les autorités ne peuvent interdire une manifestation pour laquelle ils ont reçu un préavis des organisateurs. Si la France et le Brésil sont plus démocratiques que la Suisse, c'est que les travailleurs brésiliens et français ne se sont pas laissés effrayer par leurs tyrans et ont lutté pour obtenir ces droits. Rappelons nous que: "Grand n'est pas synonyme de redoutable. Le grand sera renversé par le petit et le petit deviendra grand." (Mao Tse-Toung)
Mais la répression sauvage de la manifestation par l'Etat bourgeois aura au moins apporter une chose de bien. Elle aura été, je l'espère, une douche froide bienvenue pour la gauche étatiste et les communistes prônant une voie idéaliste et naïvement pacifiste vers le socialisme. Les événements du 31 janvier auront rappelé à cette tendance de la gauche radicale que l'Etat n'est pas l'incarnation de l'Idée du Bien commun mais un Etat de classe, la superstructure bourgeoise, le bastion armé du capitalisme et donc l'ennemi des masses populaires. La répression aura aussi rappelé aux idéalistes du mouvement communiste que la "démocratie" n'est qu'illusion, et que la bourgeoisie ne jouera pas le jeu de la "démocratie suisse semi-directe" lorsqu'elle aura le moindre risque de le perdre. La brutalité de la répression d'une manifestation qui n'avait pour but que de dénoncer et qui ne réunissait que 2000 personnes grand max laisse imaginer ce qu'elle fera le jour où elle se sentira réellement menacée. N'oublions pas que la bourgeoisie à écrasé dans le sang toutes les révolutions qui ne l'ont pas renversé. Dès lors, rêver d'une voie douce et sans heurts vers le socialisme tient précisément du doux rêve. "L'enfer est pavé de bonne intentions" dit le proverbe; respecter à la lettre des règles que la bourgeoisie ne songe pas même à respecter est une voie qui ne peut conduire le prolétariat, qui se sera ainsi privé de sa capacité de résistance, que dans la prison à ciel ouvert du fascisme. En un mot, la répression de la manif Anti-WEF rappelle aux communistes non-léninistes qu'ils ont tort sur toute la ligne! Il ne suffit pas de rêver de communisme pour être communiste, il faut encore se donner les moyens, tous les moyens, de construire effectivement le communisme. Le chant révolutionnaire Resolution der Kommunarden aux bourgeois: "Ihr hört auf die Kanonen, Andere Sprache könnt ihr nicht verstehen" (vous entendez les canons, vous ne sauriez comprendre une autre langue). L'histoire a montré que cela est malheureusement vrai et que les puissants ne comprennent jamais que le langage de la force, alors pourquoi les peuples devraient-ils leurs parler une autre langue? Faudrait-il se laisser massacrer au nom des valeurs de démocratie et de non-violence? "Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs" (Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, Révolution française, 1793). L'entêtement des puissants à vouloir conserver leurs privilèges par tous les moyens, y compris les plus criminels, oblige les peuples à devoir employer la force pour prendre le pouvoir et le conserver afin de pouvoir effectivement construire un monde plus juste. Pour rompre avec la dictature de la bourgeoisie qui nous opprime, comment saurions nous nous passer de la dictature du prolétariat?

2 commentaires:

  1. Bon texte :)

    Je ne peu que être d'accord avec ce qui y est ecris...l'illusion de democratie et de liberte façonner par les médias commence a en enerver plus d'un!Qui sont ils pour nous parler de respect ? qui sont ils pour nous prendre de haut et s'indigner de quelque pseudo casse alors qu'ils defendent un systeme qui a déjà un certaint nombre de morts sur le dos.

    Dis moi que préconise tu pour nous sortir de tous sa ? crois tu réelement en une victoire institutionele,car bien que n'étant pas maoiste , le cher Mao
    que tu cite dans ton texte nous a aussi dit ""Chaque communiste doit assimiler cette vérité:le pouvoir est au bout du fusil.""

    RépondreSupprimer
  2. Merci pour ton commentaire. Je suis heureux de savoir que mes idées rencontrent du soutient ds mon collège (j'aurais bien voulu savoir qui tu es). Est-ce que je crois à une victoire institutionnelle? Clairement non, c'est là le sens du dernier paragraphe de mon texte. La "voie parlementaire vers le socialisme" est une ineptie. L'Etat n'est pas un arbitre au dessus des classes, mais un instrument de domination au service de la bourgeoisie. Ses institutions sont conservatrices de par leur structure même. Essayez de passer par elles pour changer la société mène droit au réformisme et à l'abandon de tout horisont révolutionnaire. Egalement, jamais la classe dirigeante ne s'est résigné à accepter une choix du peuple qui ne lui plaît pas, toutes les révolutions qui n'ont pas triomphé, elle les a massacré dans le sang.

    La phrase de Mao que tu cites est juste. Elle veut dire que c'est la force des armes qui fait que le pouvoir est pouvoir. Par contre, elle n'implique pas forcément la prise du pouvoir par un coup d'Etat armé. Une révolution communiste implique une logique d'affrontement entre classes, la mise en place d'un contre-pouvoir révolutionnaire qui en renversant le pouvoir bourgeois devient lui-même pouvoir. Ce renversement peut, dans des cas favorables, se faire relativement pacifiquement, quoique jamais totalement sans violence, si le rapport de force est très nettement favorable au prolétariat et que la bourgeoisie est divisée. Par contre, la bourgeoisie n'abandonne jamais la partie avant d'avoir essayé tous les moyens et fait appel au fascisme en désespoir de cause. Aussi le nouveau pouvoir révolutionnaire doit pouvoir utiliser la force des armes pour se maintenir et mener jusqu'au bout la construction du socialisme. C'est pour cela que la dictature du prolétariat est nécessaire pour rompre avec celle de la bourgeoisie.

    RépondreSupprimer