07 novembre 2010

Les Républicains prennent leur revanche sur Obama



Résultats pour la Chambre des représentants


Il n’y a pas même deux ans, de l’Europe aux Etats-Unis, de la droite classique à la gauche, voire même jusqu’à certaines fractions de la gauche radicale, le monde était comme absorbé par un délire collectif, une adoration acritique, irrationnelle et quasi-religieuse de Barack Obama. Aujourd’hui on en est loin, très loin. Le président Obama a bel et bien perdu l’auréole qu’avait le candidat démocrate…et perdu les élections de mi-mandat par la même occasion. Dimanche 30 octobre, les étatsuniens avaient voté pour réélire la totalité de la Chambre des représentants, la chambre basse du Congrès, une partie du Sénat, la chambre haute, et plusieurs gouverneurs des Etats fédéraux. Les résultats provisoires sont tombés : le Parti Républicain gagne largement la majorité à la chambre basse, quoique pas suffisamment pour contrer un veto présidentiel, ainsi que plusieurs sièges de gouverneurs ; par contre les démocrates conservent une courte majorité au Sénat.

Ce vote témoigne avant tout de la désillusion du peuple américain envers le président Obama. En effet, ce dernier, à grand coups de communication politique, de beaux discours vides et de slogans creux avait réussi durant l’espace d’une campagne à incarner un espoir de changement, quoique plus que nébuleux. C’est qu’Obama fut le candidat de Wall Street, et s’il a pu sembler incarner les espérances populaires, ce n’était que sur un mode illusoire. Une fois au pouvoir, Obama ne pouvait que décevoir. Le changement promis devais nécessairement se révéler ce qu’il était : du vent, une posture rhétorique, une rupture illusoire avec le bushisme, et qui tenait plus du dévoiement politicien d’un mouvement de protestation réel que d’une rupture véritable.

La nouvelle administration démocrate ne put que révéler ce qu’elle ne pouvait qu’être : un gouvernement bourgeois au service du grand capital impérialiste, et comme telle quant au fond dans la continuité de l’administration Bush. La politique étrangère des USA resta quant à l’essentiel la même. Sur le plan intérieur, l’administration Obama sauva les banques à coups de milliards et négocia un plan de relance avec Wall Street, qui sans doute relança la croissance, mais sans création d’emploi, tel que seuls les milieux financiers en profitent alors que le taux de chômage atteint les 10%. La réforme du système de santé fut sans doute un progrès indéniable, mais toutefois plus que limité. Aucune assurance publique, aussi modeste soit elle, ne fut créée, et si l’assurance privée est devenue obligatoire et subventionnée pour les bas revenus, elle n’est pas soumise à un catalogue de prestations obligatoires et restera plus que minimale. Enfin une réforme financière fut mise en place, mais à part quelques règles très limitées pour éviter une nouvelle crise à court terme, elle n’introduit aucune régulation à même de freiner la spéculation sans limites.

Face à ce bilan décevant, en l’absence d’une opposition de gauche significative, et étant donnée l’inféodation des syndicats au Parti démocrate, les républicains on réussi à canaliser le mécontentement populaire et à se faire passer, par des procédés largement démagogiques, pour une force d’opposition populaire et démocratique au prétendu «centralisme socialiste» d’Obama. Usant et abusant de la pire démagogie d’extrême-droite, le Parti républicain a glissé plus à droite encore qu’il ne l’était déjà sous George W. Bush. Ce glissement à l’extrême-droite fut nettement renforcé par l’émergence du Tea Party, une mouvance à l’ultra-droite du Parti républicain organisé autour de l’ex colistière de John McCain, Sarah Palin. Si le Tea Party reste à ce jour un mouvement hétéroclite, il a réussi à s’imposer comme une force politique réelle, à la fois à l’intérieur du Parti républicain et autonome face à lui, et qui peut désormais dicter son agenda réactionnaire, se faisant passer pour un mouvement de révolte populaire et dévoyant le mécontentement des masses vers un projet rétrograde et profondément antipopulaire : réduction du poids de l’Etat fédéral «surdimensionné», suppression de toutes les prestations sociales et de tous les services publics, idéalisation d’un passé mythifié, démagogie raciste haineuse, conservatisme sociétal poussé à l’extrême, xénophobie, islamophobie, etc.

La cohabitation entre une administration et un Sénat démocrate et une Chambre des représentants républicaine, avec sur sa droite le Tea Party, s’annonce difficile et les néoconservateurs ont actuellement l’avantage. Toutefois, Sam Webb, président du Parti communiste des USA (CPUSA) pense que la domination de l’ultra-droite sera de courte durée. Dans l’article rédigé par lui pour People’s world, le journal du CPUSA, sur les résultats des élections il affirme : «Les républicains vont se prélasser dans l’éclat de leur victoire pendant un moment, mais ne soyez pas surpris quand beaucoup de gens qui ont voté pour eux seront désillusionnés par leur politique. Et sur cette base émergera une coalition populaire plus grande et plus forte que celle qui a élu Obama en 2008.» Sans doute, à condition de reposer sur un projet politique autrement consistant qu'un vide "Yes we can".

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