60 ans après, l’héritage de Staline en ex-URSS
60 ans exactement avant
Hugo Chavez, décédait une autre figure majeure du mouvement révolutionnaire,
Joseph Staline. Quel souvenir faut-il garder de celui que l’historiographie
bourgeoise, social-démocrate, trotskiste et même une certaine tendance du
mouvement communiste s’accorde à considérer comme le mal incarné, si ce n’est
l’alter ego d’Hitler ? Il n’est peut-être pas inutile de prendre en compte
ce qu’en pensent les habitants des pays qui composaient autrefois l’URSS, où
les retraités d’aujourd’hui avaient commencé leur vie quand Staline était au
pouvoir. Et la réponse est sans appel. Selon un sondage commandé par le
quotidien russe Vedomosti au centre
Levada (deux structures bourgeoises), près de la moitié des Russes aujourd’hui
estiment que Staline a joué un rôle positif dans l’histoire. Seulement un tiers
pensent le contraire. Lors de la commémoration organisée le 5 mars par le Parti
Communiste de la Fédération de Russie (KPRF), des milliers de personnes sont
venues se recueillir sur la tombe de Staline (on nous accordera que fort peu
d’hommes politiques du passé se voient gratifiés d’un semblable honneur). « Notre parti a aujourd’hui rassemblé
autour de lui un large bloc de forces patriotiques et populaires, et nous
sommes tous venus aujourd’hui rendre hommage à la mémoire de J.V. Staline, au
glorieux souvenir de l’époque soviétique, à nos grandes victoires. Nous sommes
venus rendre hommage à ce temps, sur les fondations duquel repose encore la
Fédération de Russie. Nous sommes venus déclarer que sans un socialisme rénové
il n’est pas possible de sortir de la crise profonde qui a englouti toute la
planète » a déclaré à cette occasion le président du Comité central du
KPRF Guennadi Ziouganov.
A la table ronde organisée par la Pravda, quotidien du
KPRF, Kazbek Taïsaev, secrétaire du Comité central et député à la Douma a
résumé ainsi la vision qu’ont les communistes russes de Joseph
Staline : « Staline était et reste pour nous un emblème et un
exemple de service désintéressé à la patrie. L’héritage laissé par le grand
guide et maître continue encore aujourd’hui de nourrir non seulement la Russie
mais aussi d’autres pays. Son héritage historique et théorique attend encore
d’être jugé. Et je suis convaincu que nos descendants jugeront Staline comme un
remarquable homme d’Etat, un père plein de sagesse et un mentor du peuple
soviétique et des peuples frères de l’URSS. » La Pravda a consacré
d’intéressants articles de fond à l’œuvre politique et théorique de Staline.
Nombre de sections du KPRF ont organisé des événements en l’honneur de l’homme
qui pour leurs membres reste avant tout celui qui a permis à l’URSS, ruinée par
la Première Guerre mondiale et la Guerre civile, de devenir une grande
puissance, a dirigé la construction du socialisme et mené son pays à la
victoire en 1945. La section de KPRF de Volgograd (anciennement Stalingrad, le
nom officiel de la section est d’ailleurs section régionale de Stalingrad) ont
décidé d’élever un monument à Staline. Le secrétaire de la section, Nikolaï
Parchin, a expliqué ainsi cette décision : « Les mérites de Staline
reçoivent des évaluations différentes dans la société. Si on parle autant d’un
homme, c’est qu’il est vraiment un personnage important. Et la tâche des communistes
est de préserver ce grand nom. Nous devons élever un monument à Staline dans
notre ville.
Le KPRF, dont les membres portent souvent des portraits
de Staline dans les manifestations, est aujourd’hui un parti de masse, bien
implanté dans la société russe, et qui a fait près de 20% en 2012 aux élections
à la Douma. Ce résultat, que peu de partis communistes aujourd’hui atteignent,
ce d’autant qu’il est grandement sous-évalué par les fraudes massives
organisées par le parti au pouvoir, Russie unie, ne serait pas possible si
beaucoup de Russes ne partageaient pas l’avis du KPRF sur Staline et la période
soviétique de leur histoire. L’exemple du KPRF mérite d’inspirer largement tous
les communistes à se réapproprier leur histoire et à analyser objectivement,
sans préjugés, en marxistes, l’expérience du premier pays socialiste de la
planète, sans omettre ses contradictions, mais en rompant radicalement avec la
mythologie créée par la propagande bourgeoise et la diabolisation irrationnelle
et antihistorique de l’homme qui fut à la tête de l’URSS dans les années les
plus difficiles et les plus tragiques de son histoire. Ou comme le dit Domenico
Losurdo – auteur du remarquable Staline,
histoire et critique d’une légende noire – dans Fuir l’histoire ? la révolution russe et la révolution chinoise
aujourd’hui : « Aujourd’hui nous assistons à une sorte de
colonisation de la conscience historique des communistes. Il s’agit de quelque
chose de plus qu’une simple métaphore. Historiquement, le mouvement communiste
est arrivé au pouvoir dans des pays coloniaux ou, en tout cas, en marge de
l’Occident. D’autre part, avec le triomphe de la mondialisation et de la pax
americana, du point de vue multimédiatique, le reste du monde est devenu une
province et une colonie, du moins potentielle, par rapport au centre de
l’Empire qui, depuis Washington, peut atteindre et atteint quotidiennement
chaque point du globe avec une puissance de feu multimédiatique concentrée. Il
est difficile de résister à tout cela, mais sans cette résistance, on n’est pas
communiste. »
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