23 juin 2022

« Pouchkine est notre Étendard et le Symbole du Monde russe », discours de Guennadi Ziouganov, traduit dans un but d’utilité publique


Je ne partage à peu près aucun des propos, qui me scandalisent profondément, du discours qui suit, prononcé par Guennadi Ziouganov, président du Comité central du Parti communiste de la Fédération de Russie (KPRF), le 6 juin 2022. Si j’ai pris la peine de le traduire, c’est dans un but d’utilité publique.

Beaucoup de communistes ne sont que peu, ou indirectement, informés de la position du KPRF sur l’ « opération militaire spéciale », et il est difficile de trouver des documents en français à ce sujet. Des camarades anti-impérialistes mal informés, et des complotistes encore moins bien informés, vont jusqu’à soutenir la guerre menée par la Russie, influencés par la propagande russe, et se réfèrent à la position du KPRF pour justifier qu’il s’agit d’une position idéologiquement juste, sans savoir avec quels arguments ce parti justifie sa position, ni à quel point il a dérivé dans le social-chauvinisme.

Le poème « Aux calomniateurs de la Russie » fut écrit en 1831 par Pouchkine pour justifier la répression sanglante d’une insurrection polonaise face aux critiques européennes. Le grand poète – mal inspiré en l’occurrence – y formule à l’avance tous les éléments de langage de la propagande poutinienne : il s’agit d’une dispute entre Slaves qui ne vous regarde pas (le « monde russe ») ; si vous nous critiquez, c’est juste que vous détestez la Russie (la « russophobie ») ; nous vous avons libéré du tyran qui vous opprimait (Napoléon en l’occurrence), et vous nous êtes redevables ; c’est nous les vainqueurs, et on peut le refaire. Bien entendu, l’œuvre du grand poète ne peut en aucun cas se réduire à cette caricature absurde d’idéologue du « Monde russe ».

Ici le lien vers l’article original, pour que vous puissiez vérifier mes dires, et éventuellement vérifier ma traduction : https://kprf.ru/dep/gosduma/activities/211211.html

Il m’en coûte de devoir critiquer le KPRF, du fait de ce que ce parti a représenté. Mais il n’est pas possible de taire la vérité, ni dans l’intérêt du mouvement communiste international. Toute la prose du KPRF n’est pas du style du discours qui va suivre aujourd’hui. Le KPRF continue de s’engager pour la justice sociale et les classes populaires, et critique justement la politique socio-économique du pouvoir poutinien. Mais la dérive nationaliste est incontestable, et indéfendable.

Guennadi Ziouganov se souvient-il encore de ses lectures des classiques du marxisme-léninisme ? Qu’aurait pensé Marx si on lui avait dit qu’un de ses disciples justifierait la répression d’une insurrection nationale polonaise par le régime tsariste ? Qu’aurait pensé Lénine s’il savait que son prétendu héritier ferait l’apologie de l’autocratie tsariste, les bolchéviks ayant seulement pris le relai lorsque le tsar a failli à la tâche ? J’ai beau chercher, même au microscope électronique je ne trouve aucune trace de marxisme-léninisme dans tout ça.

 

Aujourd’hui c’est une fête extraordinaire : l’Anniversaire d’Alexandre Pouchkine et le Jour de langue russe. Il y a onze ans, j’ai adressé au Président la proposition que naisse une nouvelle fête. En ce temps avaient lieu des attaques particulièrement haineuses des russophobes sur le Monde russe. Et Vladimir Poutine a soutenu notre proposition. Ainsi est née une fête annuelle : le Jour de la langue russe et l’Anniversaire d’Alexandre Pouchkine.

Les Russes ont inventé durant leur histoire millénaire un État génial. Il y a près de deux cents États au monde, mais seule une dizaine de pays ont une histoire millénaire. Je souhaite que vos descendants se rappellent, que c’est l’invention principale du peuple russe. Nous avons rassemblé en mille ans sous nos drapeaux 190 peuples et peuplades, sans détruire une seule foi, une seule langue, une seule tradition, une seule culture.

Tous ces peuples se sont unis en une puissance commune de façon volontaire. Et aujourd’hui encore nous défendons ensemble notre vaste territoire avec courage et dignité.

La Russophobie et l’antisoviétisme ont atteint aujourd’hui leur point culminant. Presque 400 dirigeants russes sont sous sanctions. Dix mille sanctions, qui se sont abattues sur notre pays, ont modifié le vecteur d’évolution de la planète. La civilisation se déplace de l’Ouest à l’Est. Et plus personne ne pourra arrêter cela.

Il y a au monde seulement deux États, qui durant les derniers 500 ans n’ont jamais perdu leur souveraineté. C’est la Russie et l’Angleterre. Mais nous seuls avons dû passer sept cents ans sur un millénaire en combats et expéditions. C’est les armes à la main que nous avons défendu notre droit de parler notre langue, d’aimer notre terre et de défendre nos amis et nos compagnons, que nous avons rassemblé sur cet immense espace qui va de la Baltique et de la mer Noire à l’océan Pacifique.

Aujourd’hui, une guerre est déclarée au Monde russe. Et c’est pourquoi la célébration de l’Anniversaire d’Alexandre Pouchkine et du Jour de la langue russe a une signification particulière.

Notre pays a quatre appuis historiques.

C’est, avant tout, un pouvoir exécutif fort, qui doit être intelligent, éduqué, consciencieux.

C’est également une haute spiritualité. Car sans la langue russe, la foi orthodoxe et notre culture nous n’aurions pas pu survivre.

C’est le sentiment d’unité, de solidarité, de collectivité. Car sans le collectivisme russe il n’est pas possible de maîtriser ces étendues gigantesques.

C’est aussi le sens de la justice.

Lorsque ces appuis étaient les plus fort est né le grand État soviétique.

En URSS on donnait à chacun une instruction gratuite. Alors qu’en 1917 une personne sur deux en Russie ne savait ni lire ni écrire. Mais déjà dans les premières années du pouvoir soviétique fut créée une commission de lutte contre l’analphabétisme. En dix ans nous nous vaincu l’analphabétisme. La langue russe, la parole russe, la poésie russe, le verbe russe ont dominé dans tous les établissements de formation.

Dans l’abécédaire soviétique les vers de Pouchkine étaient imprimés dès les toutes premières pages. Alexandre Pouchkine n’a vécu que 37 ans, mais il nous a laissé en héritage une œuvre géniale. De ce vivant déjà il était qualifié de génie, ce qui n’arrive que très rarement. 

Ouvrons un volume d’œuvres de Pouchkine : n’importe quel lecteur y trouvera son intérêt. Ce sont des contes merveilleux, qui nous apprennent à aimer, nous imprimeront les sentiments du patriotisme, du bien et de la justice. Pouchkine a écrit des poèmes magnifiques. Son Eugène Onéguine est un roman en vers, qui est une encyclopédie de la vie russe. Si vous voulez comprendre comment il faut lutter pour le Monde russe contre le bandérisme, ouvrez le poème de Pouchkine qu’est « Poltava ».

Si vous voulez comprendre, ce qu’est le cours majestueux de la Neva et la construction de l’État, ouvrez le « Cavalier de cuivre », et vous le ressentirez.

Si vous voulez comprendre quelle était la nature de la révolte de Pougatchev, de nouveau, lisez Pouchkine. Il est spécialement allé dans les steppes de Yaitsk et s’est entretenu avec ceux qui ont participé à l’insurrection avec Pougatchev. Et après cela il a écrit son immortelle Fille du capitaine.

Le génie de Pouchkine consistait dans le fait que dans son grand poème il a répondu à tous les calomniateurs de la Russie. Et je conseille de commencer aujourd’hui l’enseignement dans les écoles et les universités par un cours public, consacré à l’œuvre de Pouchkine, où on lirait le poème « Aux calomniateurs de la Russie ».

Aussi ne sommes-nous pas venus aujourd’hui simplement pour déposer une couronne de fleurs et rendre hommage à Pouchkine. Mais aussi pour rappeler à tous les russophobes et antisoviétiques, que Pouchkine est aujourd’hui encore en première ligne avec la grande littérature classique russe. Il se bat encore pour une langue magnifique, pour le sentiment de civisme et de patriotisme. Pouchkine montre l’exemple de comment il faut lutter contre les calomniateurs et défendre le puissant verbe russe.

L’Empire des tsars reposait sur trois choses : Dieu, le tsar et la patrie. La foi et la culture orthodoxe a rassemblé le pays, la patrie se développait, et l’autocratie tsariste aidait à maîtriser des étendues gigantesques. Lorsque le tsar ne fut pas à la hauteur, lorsque le gouvernement tsariste s’est détourné des plus grands idéaux, tout s’est effondré. Alors, la modernisation léniniste-stalinienne a montré que, si on choisit comme fondation le travail, la justice, l’amitié entre les peuples, un humanisme élevé, la science et l’instruction, on peut rassembler pacifiquement en Congrès le pays. Ainsi fut fondée l’Union soviétique. Elle se révéla la plus victorieuse, la plus puissante et la plus éduquée.

Lorsque les autorités russes se sont détournées des idéaux socialistes en 1911, le pays est devenu un protectorat étatsunien. Et nous ne pouvons toujours pas nous en libérer.

Alors, qu’est qui nous maintient unis aujourd’hui ? Nous unit la puissante langue russe, notre grande histoire victorieuse, et la compréhension du fait, que c’est seulement ensemble, en nous appuyant sur ce qu’il y avait de meilleur dans notre passé, nous pouvons vaincre ces forces nazies-bandéristes fascisantes, qui se sont manifestées dans toute l’Europe, et qui mène contre nous une guerre sous la direction des globalistes étatsuniens.

Je suis convaincu que nous triompherons. Mais je souhaite rappeler encore une fois à ceux qui n’ont pas compris l’essence et la signification des exigences du président de vaincre le nazisme et de mener une démilitarisation de l’Ukraine sœur : après la sortie de l’Union, le premier document secret fut l’obligation pour les conscrits ukrainiens de faire la guerre contre la Russie. Ensuite, les autorités ukrainiennes ont tout fait pour détruire leur économie et l’inscrire dans la structure de l’économie étatsunienne.

Et lorsqu’ils ont commencé à détruire des monuments, certains journalistes ont ri de la destruction des statues de Lénine. Pourtant c’est bien le pouvoir soviétique qui a tout fait pour le développement de l’Ukraine, qui par son potentiel faisait partie des dix États les plus puissants du monde. On y produisait les meilleurs avions, les meilleurs bateaux, les meilleures fusées. Maintenant on n’y produit plus rien. On fait qu’importer d’Occident des munitions et de canons, pour tirer sur le Donbass. Et maintenant on a commencé en Ukraine à lutter contre les monuments à Pouchkine, Souvorov, Catherine II, au maréchal Joukov, détruisant tout ce qui est lié à notre grande histoire et à notre grande victoire.

C’est pourquoi nous unit avant tout la langue russe, la culture et la Victoire. Et Pouchkine est, dans ce cas précis, notre étendard et notre soleil, pas seulement de la poésie nationale, mais aussi de notre État.

Je vous souhaite à tous une bonne fête !

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