Si la pandémie du Covid-19 est loin d’être finie, que nul ne sait quand elle le sera, derrière la crise sanitaire, c’est une autre crise qui se profile, ou plutôt qui est déjà réalité : une crise économique majeure, doublée d’une crise sociale. L’économie mondiale est en récession, plus ou moins accentuée selon les pays, à l’exception notable de la République populaire de Chine.
La Suisse est également en récession. Les dégâts ont pu être globalement contenus jusque là, grâce aux mesures prises par la Confédération durant le premier semi-confinement : crédits cautionnés, allocations pour pertes de gain et RHT. Cela n’a pourtant pas suffi pour empêcher une première vague de licenciements. Mais ce n’est qu’un sursis. Beaucoup de PME, dans la restauration, le commerce, le tourisme,...sont à bout, et ne pourraient se permettre de s’endetter davantage. Le monde de la culture est aussi dans une situation dramatique. Le deuxième semi-confinement menace de causer une vague de faillites, avec le désastre social que cela impliquerait.
La bourgeoisie, ses associations patronales, ses hommes politiques, ses économistes, sont divisés sur la conduite à adopter face à cette crise. Et, parmi les différentes fractions de la bourgeoisie, c’est l’UDC qui a adopté la ligne néolibérale la plus jusqu’au-boutiste. Guy Parmelin s’est fait la mauvaise volonté incarnée d’aller au-delà des mesures déjà existantes, et notoirement insuffisantes, de soutien aux entreprises empêchées de travailler du fait des mesures sanitaires. Ueli Maurer s’est fait la caricature incarnée du grand argentier près de ses sous, et refusant d’en lâcher davantage que les infimes montants prévus à titre d’aides à fonds perdus pour les cas de rigueur.
A qui profiterait concrètement cette approche de laisser-faire et d’austérité ? La réponse n’est pas difficile : aux monopoles, dont la situation financière est assez solide pour résister à la période difficile de la crise, et qui auront beau jeu ensuite de récupérer les parts de marché laissées vacantes par leurs concurrents plus petits et plus faibles, qui auront fait faillite, pour relancer un nouveau cycle d’accumulation du capital. Et parmi ces monopoles, a fortiori ceux qui non seulement n’ont pas à se « restructurer », mais ne se sont jamais si bien porté : les GAFAM, les grandes banques…Ce qui rappelle, pour qui s’en douter, que l’UDC n’est aucunement le parti du « peuple suisse », ni celui des paysans, ni des PME, mais seulement celui des monopoles. Inutile de dire quel drame social impliquerait l’application de cette politique néolibérale. Pour l’UDC, ce sont sans doute de simples dommages collatéraux…
Toute la bourgeoisie n’est pas d’accord avec cette ligne jusqu’au-boutiste. Le canton de Vaud a décidé d’un plan de relance devisé à 115 millions de francs. On lit d’intéressants commentaires dans le Temps du 6 novembre à ce sujet. Nils Soguel, vice-directeur de l’Institut de hautes études en administration publique : « Quelle que soit la situation financière du canton, ce n’est de toute manière pas le moment de vouloir lutter contre l’endettement. Il est trop tard, ou trop tôt pour penser à ce problème ». Et Cédric Tille, économiste : « Il faut tout de même éviter de vouloir faire du perfectionnisme helvétique. Si on en fait trop et qu’on s’aperçoit qu’on a soutenu des zombies, on aura gaspillé un peu, mais rien ne sera irrémédiable. Si on déclenche une cascade de faillites, le savoir-faire et l’activité économique sont beaucoup plus difficiles à remettre en marche ». Une partie lucide de la bourgeoisie abandonne l’idéologie néolibérale (du moins, du temps de la crise) et se convertit au keynésianisme.
Qu’est-ce que le Parti du Travail pense de cette situation de crise ? Premièrement, et avant toute chose, il faut répondre à l’urgence sociale. Le premier semi-confinement a révélé l’existence d’une pauvreté à grande échelle dans notre pays, pauvreté que la crise a encore aggravé. Le filet social existant est notoirement insuffisant. Un revenu garanti, pour toutes et tous, est indispensable.
Deuxièmement, la crise économique n’est pas la simple conséquence de la pandémie, et des mesures prises pour la combattre. Cette crise est une crise structurelle, de suraccumulation du capital. Un plan de relance ne suffira pas à « revenir à la normale ». Un tel plan de relance est néanmoins indispensable, ne serait-ce que pour éviter le désastre sociale de faillites en cascade, avec autant de travailleurs jetés sur le carreau. La « restructuration » par le marché de secteurs « dépassés » doit être refusée, pour des raisons tant sociales qu’économiques. Il n’est certes pas possible, ni raisonnable de maintenir artificiellement en vie des secteurs entiers de l’économie, mais si restructuration il doit y avoir, celle-ci doit être accompagnée, avec des solutions de reconversion sérieuses pour les travailleurs, plutôt que de laisser faire les forces destructrices du marché.
Mais les mesures keynésiennes ne sont au mieux que des solutions temporaires. Une relance de l’accumulation du capital se ferait au prix d’une aggravation de l’exploitation des travailleurs, et impliquerait un désastre écologique inégalé. Une sortie de crise, socialement juste et écologiquement durable, suppose selon nous la création massive d’emplois, publics ou coopératifs, socialement et écologiquement utiles. Mais la seule façon de mettre fin aux crises du capitalisme, c’est le socialisme.
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