25 janvier 2009

Pourquoi un NON sans ambiguïtés aux bilatérales s’impose ?




A première vue, comment être de gauche et dire NON à la libre circulation ? Cette terminologie induit en erreur les tenants du OUI. Car bien sûr il serait impensable d’être dans le camp des travailleurs et contre le droit de chacun de se déplacer librement. Mais ce n’est pas sur cela que nous voterons le 8 février. Les accords bilatéraux sont intitulés ainsi pour tromper les peuples, en vérité ils ne sont porteurs d’aucune émancipation, ni d’aucune liberté pour les travailleurs. Au contraire, il s’agit d’un projet ultraréactionnaire qui n’a de fait que peu à voir avec la « libre circulation des personnes » (qui est régie par la Loi sur les étrangers). Il s’agit exclusivement d’une libéralisation du marché du travail, non pas d’une quelconque « liberté » abstraite de tout être humain mais d’une « liberté » bien concrète pour le capital d’exploiter et de faire circuler sans entraves la marchandise force de travail. En fait, la vraie question à laquelle nous devrons répondre est si oui ou non nous acceptons que les règles en vigueur dans l’Union Européenne s’appliquent en Suisse.

De fait, nous voterons sur la superstructure juridique et étatique, et non sur des supposés droits nouveaux pour les travailleurs, droits qui n’existent que dans l’imagination de la gauche europhile. Dire OUI reviendrait à confirmer la « semi adhésion » de la Suisse à l’Union Européenne. Or l’Union Européenne n’est ni un magnifique « projet de civilisation » (dixit Laurent Fabius), ni un simple changement d’échelle pour dépasser le cadre obsolète des Etats nationaux. Née avec le traité de Maastricht en 1991 (l’année de la chute de l’URSS), celle-ci était destinée à un usage bien précis : graver dans le marbre l’avantage pris par la bourgeoisie sur le prolétariat, liquider tous les acquis sociaux ainsi que la démocratie bourgeoise, afin d’imposer une brutale thérapie de choc néolibérale aux peuples. C’est ce qui explique la flagrante absence de démocratie dans le fonctionnement de l’UE, dirigée par une Commission de technocrates cooptés et qui n’ont aucun compte à rendre aux peuples et régie par des traités ratifiés par les parlements, sans que les peuples aient le droit de se prononcer (et qu’ils rejettent toujours lorsqu’ils reçoivent la possibilité de voter). Il n’est donc pas étonnant que les institutions européennes mènent une politique réactionnaire forcenée : une récente directive européenne autorise les patrons à faire travailler leurs travailleurs jusqu’à 67 heures par semaine.

Et ce contenu réactionnaire constitue l’essence même des accords sur lesquels nous allons voter. Car ils prévoient la « libre prestation de services », c’est-à-dire le droit pour des entreprises de « détacher » à l’étranger des travailleurs pour une durée limitée aux conditions en vigueur dans les pays d’origine de ces entreprises, ou tout simplement le droit de faire travailler en Suisse des travailleurs d’Europe de l’Est aux salaires et horaires d’Europe de l’Est : la porte ouverte à tous les dumpings. A noter que les conventions collectives ne s’appliquent pas dans ces cas et que les syndicats ont l’interdiction de lutter pour les faire appliquer ! La Cour Européenne de Justice (une autre institution de technocrates cooptés…) a plusieurs fois statué dans ce sens. Ainsi l’argument selon lequel ce serait se tromper de combat que de combattre les accords bilatéraux plutôt que de lutter pour renforcer les mesures d’accompagnement ne tient pas la route : s’opposer aux bilatérales c’est lutter directement contre le dumping salarial et pour les droits des travailleurs.


L’argument de l’internationalisme ne tient pas la route non plus. Car l’internationalisme prolétarien implique de combattre l’ « internationale du capital », dont l’UE est un des avatars. « On ne défend pas les travailleurs si on ne défend pas tous les travailleurs », et c’est pour cela que nous devons dire NON aux bilatérales. Car contrairement à ce que prétend la propagande bourgeoise, l’Union Européenne n’a en rien profité aux peuples d’Europe de l’Est ; bien au contraire, l’UE a imposé comme condition d’adhésion aux ex-républiques populaires de l’Est une thérapie de choc néolibérale qui impliquait la liquidation de l’industrie d’Etat construite à l’époque socialiste. C’est la classe dirigeant d’Europe qui a volontairement créé le chômage et la misère de masse dans ces pays pour obtenir une grande armée de réserve au service du capital et liquider les acquis salariaux et sociaux obtenus par des décennies de lutte. Refuser les bilatérales c’est donc soutenir les travailleurs d’Europe de l’Est dans leur lutte contre leur oppression par la bourgeoisie européenne et les institutions de l’UE à son service.

Citer le « Discours sur le libre échange » de Marx à l’appui du OUI est tout aussi malvenu. Tout simplement parce que nous ne sommes plus en 1848 ; il ne s’agit pas aujourd’hui de voter pour le libre-échange afin de liquider les dernières survivances de l’économie féodale et que les acquis salariaux et sociaux ne sont pas du « protectionnisme ». De plus, « la pratique est le critère de la vérité » (Engels), la pratique et non pas la citation. Si nous suivons jusqu’au bout cette vision scolastique et citationiste de Marx, nous arriverons à la conclusion que nous ne devons pas défendre les acquis sociaux, mais au contraire de soutenir toutes les régressions néolibérales dans une optique « révolutionnaire », afin de durcir l’antagonisme entre classes jusqu’à ce que la révolution en résulte. Soutenir le néolibéralisme dans une optique révolutionnaire ? C’est une conception pour le moins étrange du marxisme. « Mondialisons nos luttes », a dit Julien Sansonnens. Eh bien justement, unissons-nous aux travailleurs des autres pays d’Europe dans un combat commun contre l’Union Européenne antidémocratique et réactionnaire, non pas pour retourner à un mythique âge d’or de l’Etat providence qui n’a jamais existé, mais pour renverser la bourgeoisie qui nous opprime et construire une nouvelle Europe, une Europe débarrassée à jamais de toute oppression, une Europe des peuples, démocratique et socialiste.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

bla bla bla...

excuses cette entrée en matière quelque peu cavalière, mais je n'ai pu m'en empêcher! Quand je lis ta prose, je ne cesse de penser que Marx, lui, partait de la réalité économique et historique pour construire sa théorie et non de la théorie pour juger la réalité. Je m'explique: l'union européenne existe, tout comme l'imbrication économico-juridique de la suisse dans cette union. Que l'on vote oui ou non ne change rien, mais rien du tout à cette réalité. Par ailleurs, il ne s'agissait pas d'accepter ou non le principe de "libre-circulation", mais bien de l'étendre à deux pays. A mon avis, le vrai combat n'est donc pas dans la question posée aux citoyens, mais dans la mise en oeuvre de cette libre-circulation: il ne faut pas se battre pour un "non" qui ne mène nulle part, mais tout faire pour que les mesures d'accompagnements, comme ils disent, deviennent réalité. Il faut des contrôleurs du travail, beaucoup de contrôleurs, pour empêcher ce qui arrive déjà et ce qui arrivera toujours plus dans le futur: que des travailleurs détachés travaillent comme des bêtes pour un salaire ridicule dans notre beau pays et que corollairement, le chômage augmente, ce qui fera bien entendu les chous gras des xénophobes de tous poils et surtout de l'UDC. Bien sûr que ce serait bien si l'europe était démocratique et socialiste.... mais ça ne risque pas d'arriver demain, vu la tronche de nos sociétés et de ses dirigeants. Alors autant se préoccuper des problèmes concrets au lieu de se draper dans une prose déconnectée de la réalité!

Voilà, voilà, ce que j'en dit, quitte à me faire taxer de vieille réac ou de sociale-traître. La gauche qui se veut radicale a l'invective facile!