15 novembre 2021

Initiative sur la justice : NON à l’initiative privée d’un multimillionnaire, qui n’apporte au-cune avancée démocratique

 


Actuellement, le Tribunal fédéral (TF) est élu par l’Assemblée fédérale, les postes de juges étant répartis au prorata de la représentation des principaux partis au parlement (ce qui exclut donc le membres des petits partis, comme les juristes sans appartenance politique, de la possibilité de siéger au Tribunal fédéral). Ces juges sont élus pour des mandats de six ans, renouvelables. L’initiative propose que les juges au TF soient tirés au sort, parmi des candidats sélectionnés par une commission nommée à cette fin par le Conseil fédéral. Les juges désignés pourraient siéger jusqu’à l’âge de 70 ans de façon inamovible, et ne pourraient être révoqués que pour manquements graves, ou incapacité manifeste à continuer d’exercer leur fonction.

 

N’ayant aucun juge fédéral issu de ses rangs, le Parti du Travail n’a aucun intérêt propre à défendre dans cette affaire. Nous appelons néanmoins à voter NON à cette initiative. Ce, pour trois raisons.

 

Une initiative oligarchique

 

L’initiative pour la justice ne vient pas d’une revendication populaire un tant soit peu massive. Aucune organisation représentative ne la porte. Il s’agit de la lubie d’un seul homme, un multimillionnaire, Adrian Gasser, qui a payé des entreprises de récolte de signatures pour faire aboutir son initiative. C’est aussi lui qui paye pour un affichage massif pour son initiative. Qu’un bourgeois puisse ainsi se payer son initiative populaire fédérale – alors qu’en faire aboutir une de-mande des centaines de militants et un travail acharné pour des gens normaux – est non seulement un biais de la démocratie, mais foncièrement anti-démocratique, oligarchique en son essence. Une telle initiative mérite d’être rejetée pour cette seule raison. Les entreprises de récolte de signatures devraient d’ailleurs être interdites, comme biaisant la démocratie.

 

M. Gasser n’est pas non plus n’importe quel millionnaire. Nous lui devons une reconnaissance partielle du droit de grève. Mais c’est bien malgré lui. En 1994, il avait licencié la totalité de ses ouvriers en grève, pour les réembaucher à des conditions moins favorables. Même la droite avait trouvé que ça allait trop loin, aussi une loi fut votée pour interdire à l’avenir de telles pratiques. Cela permit qu’une partie de la droite finisse par voter l’inscription du droit de grève (même limité) dans la Constitution. Ce qui en fait un ennemi patenté de la classe ouvrière, dont toute proposition mérite d’être rejetée.

 

Dépolitiser la justice ?

 

Le but principal de l’initiative est de retirer le choix des juges fédéraux au parlement, pour dissocier cette fonction de l’appartenance à un parti politique. Ce afin de garantir la séparation des pouvoirs, et d’aboutir à une justice non-politique, soustraite aux pressions des partis sur « leurs » juges, pour qu’ils votent selon la ligne de leur parti. Comme exemple de « pression » on cite celui d’un juge UDC dont son parti a essayé d’empêcher la réélection…mais qui fut réélu malgré tout. Preuve que les « pressions » ne sont pas aussi fortes que ça.

 

Y a-t-il un problème de sépara-tion des pouvoirs avec le système actuel ? Peut-être. Est-ce que la séparation des pouvoirs est un principe essentiel ? Sans aucun doute. Certes, c’est un principe d’origine libérale, face auquel la tradition marxiste fut souvent sceptique ; arguant, justement, qu’en dernière instance, le pouvoir de la classe dirigeante demeure indivis. Les pays socialistes ont même théorisé comme exemple de supériorité de leur système politique sur le parle-mentarisme bourgeois la non-séparation des pouvoirs, leurs assemblées parlementaires n’étant pas seulement parlemen-taires, mais des assemblées agissantes, faisant appliquer les lois qu’elles votaient. Soit, mais l’histoire du socialisme réel, les violations de la légalité socialiste qui eurent malheureusement lieu, plaident en faveur du fait qu’il serait erroné de négliger des principes libéraux de l’État de droit et de la séparation des pouvoirs, pour la seule raison qu’ils sont libéraux. Même sous le socialisme, les individus doivent pouvoir être protégés contre l’arbitraire de la part de l’État. Et la séparation des pouvoirs consti-tue une prévention contre l’abus de pouvoir. Cela dit, y a-t-il un vrai problème de séparation des pouvoirs en Suisse ? D’un con-trôle abusif de l’Assemblée fédérale sur le Tribunal fédéral ? Pas vraiment.

 

Mais le problème serait en tout cas le même avec la commission spéciale nommée par le Conseil fédéral. Selon quels critères les membres de ladite commission seraient sélectionnés ? Il est difficile à imaginer qu’aucun critère de nature politique n’entrerait en jeu. Qui plus est, ces éventuels critères politiques – qui influenceraient certainement le choix des candidatures présélectionnées – serait soustrait à quelque con-trôle démocratique que ce soit, puisqu’il serait à la discrétion du Conseil fédéral. On risquerait donc d’aboutir à un tribunal réellement politisé – et pas dans le bon sens évidemment – ce d’autant que les juges y siègeraient quasiment à vie. Tout le contraire de la démocratie en somme, plutôt le type de technocratie autoritaire – et défendant des intérêts de classe bien déterminés – que le néolibéralisme affectionne. L’élection, par le parlement en l’occurrence, garantit au moins une certaine forme de légitimité démocratique. Une démocratie représentative véritable présuppose d’ailleurs non seulement l’élection des représentants, mais aussi une durée raisonnablement brève des mandats, et (c’est une revendication classique du mouvement ouvrier) le droit de révocation de la part des représentés.

 

En revanche, il est totalement faux de soutenir que l’exercice de la justice ne soit pas politique, qu’il faille le dépolitiser. Les tribunaux ne font pas qu’appliquer la loi. La loi ne peut jamais être totalement exhaustive, et laisse inévitablement aux juges une marge d’interprétation. La jurisprudence du Tribunal fédéral est d’ailleurs une des trois sources du droit, avec la loi et la doctrine. On peut difficilement considérer que les opinions politiques des juges n’y aient aucune part. L’exemple des USA est certes extrême, mais le fait que le droit étatsunien change du tout au tout selon la majorité au sein de la Cour suprême montre à quel point l’exercice du droit est politique. Il existe également différentes normes légales, parfois en contradictions entre elles, et la décision desquelles priment (au hasard, le droit de propriété ou les accords de libre-échange sur les droits humains) est profondément politique.

 

Le tirage au sort, une avancée démocratique ?

 

Il existe de nos jours à gauche une mode d’idéaliser le tirage au sort pour la désignation d’assemblées représentatives, en lieu et place de l’élection, comme – si ce n’est la panacée de la démocratie – du moins une avancée démocratique.

 

Cette mode s’appuie sur une idéalisation de la démocratie telle qu’elle existait dans l’Antiquité à Athènes. Passons sur l’objection facile : l’antique Athènes était une société esclavagiste, où seuls les hommes libres et athéniens d’origine étaient citoyens, soit 10% de la population seulement ; et ces citoyens pouvaient trouver le temps de s’adonner à la politique précisément parce que d’autres travaillaient pour eux. Mais peut-être que ce système serait universalisable, pour toutes et tous, et non une minorité ?

 

Il s’agit à notre avis d’une illusion, basée sur une méconnaissance de la façon dont le système athénien fonctionnait réellement. Il n’était pas aussi « démocratique » qu’il n’en avait l’air. Certes, la démocratie athénienne combinait la souveraineté en dernière instance de l’Assemblée populaire (où tous les citoyens votaient selon le principe « un homme une voix ») et du tirage au sort pour certaines fonctions à responsabilité. Cette combinaison était censée garantir la possibilité pour chaque citoyen de participer à l’exercice du pouvoir et d’empêcher qu’une élite politique ne se forme, confisquant le pouvoir à son profit. Remarquons que cette combinaison forme un tout : injecter du tirage au sort dans un système sans Assemblée populaire ne le rendra pas démocratique. Ensuite, les fonctions tirées au sort l’étaient parmi tous les citoyens, et pour des mandats très courts – un an généralement – et non renouvelables. Tout le contraire de juges nommés quasiment à vie, désignés parmi des candidats présélectionnés.

 

Et une élite politique existait malgré tout. Les véritables dirigeants de la démocratie athénienne, les stratèges, étaient élus, pour des mandats renouvelables. C’était tous des nobles, des eupatrides. Le véritable chef d’Athènes au sommet de sa gloire, Périclès, resta aux commandes de l’État jusqu’à son décès en cours de mandat des suites de la peste. Sa disparition laissa un vide, puisqu’il était aussi indispensable à sa démocratie que le Grand roi de Perse ne l’était à sa monarchie. Même l’Assemblée était moins démocratique qu’elle n’en avait l’air. Certes, c’était « un homme une voix ». Mais, en pratique, peu de citoyens y prenaient régulièrement la parole. C’étaient toujours les mêmes, qui avaient reçu une formation, coûteuse, en rhétorique. Inutile de préciser qu’ils étaient tous eupatrides. Quant aux tribunaux athéniens, ils étaient tirés au sort. Mais il s’agissait de jurys populaires, jugeant sur la base de lois simples et connues de tous, non d’une cour suprême établissant une jurisprudence. Athènes possédait une cour suprême, l’Aréopage (et non « Aéropage », mot qu’on entend parfois, mais qui n’existe pas), composée d’anciens magistrats, et donc au recrutement aristocratique. Mais il n’avait plus qu’une autorité morale durant l’âge d’or de la démocratie athénienne.

 

Bref, il est vain de chercher des solutions faciles aux problèmes d’aujourd’hui dans une Antiquité mal connue.

 

Une connaissance un tant soit peu sérieuse de l’histoire réelle nous incite plutôt et être pour le moins méfiant face à la mode du tirage au sort en vogue aujourd’hui à gauche. L’exemple athénien montre en effet que penser que le fait de tirer les assemblées représentatives au sort plutôt que de les élire, garantirait une expression démocratique véritable et nous débarrasserait d’une caste de politiciens au service de la bourgeoisie, et rendrait le pouvoir au peuple, est pour le mieux naïf. Le vrai problème est en effet que le suffrage universel n’empêche pas qu’une majorité de la population vote en pratique pour des partis qui ne représentent les intérêts que d’une infime minorité. Croire que le tirage au sort nous libérerait de l’hégémonie idéologique de la bourgeoisie est pour le mieux illusoire.

 

Cette mode est même contreproductive dans la mesure où elle serait de nature à faire négliger à la classe ouvrière sa principale et seule arme pour renverser ladite hégémonie : l’organisation en son propre parti politique, appelé à exercer le pouvoir et à changer la société. Comme l’écrivait Friedrich Engels : « Pour que le prolétariat soit suffisamment fort pour vaincre au moment décisif, il faut – Marx et moi-même avons défendu cette position depuis 1847, – il faut qu’il constitue un parti singulier, distinct de tous les autres et opposé à eux, un parti de classe conscient de l’être ». Cette mode est d’ailleurs surtout prônée par des milieux anarchisants.

 

L’initiative pour la justice aura au moins eu la vertu de servir d’occasion pour discuter toutes ces questions politiques. Pour le reste, elle n’en a aucune. C’est pourquoi il faut la rejeter.

Pas d’ouverture prolongée des magasins sur le dos du personnel : NON à la LHOM !

 


C’est bien certes d’avoir de la suite dans les idées et de ne pas baisser les bras trop vite, mais parfois cela confine à l’acharnement. Le terme d’acharnement, pour ne pas dire de déni de démocratie, est juste dans le cas de la droite genevoise, qui revient une nouvelle fois à la charge – alors que le peuple a dit NON à réitérées reprises ! – avec un projet de modification de la Loi sur les horaires d’ouverture des magasins, la LHOM, dans le sens d’une extension des horaires d’ouverture. Avec la nouvelle loi, les magasins ouvriraient leurs portes jusqu’à 19h00 les jours de semaine (19h30 le vendredi), ainsi que le samedi (au lieu de 18h00 aujourd’hui). Cerise sur le gâteau, les magasins pourraient ouvrir trois dimanches par an, sans devoir conclure de convention collective de travail (CCT), contrairement à ce que prévoit la loi actuelle. Les syndicats ont déposé un référendum contre cette modification de la loi. Un référendum que le Parti du Travail soutient. C’est pourquoi, nous vous appelons résolument à voter NON.

 

Depuis des années, le secteur du commerce de détail a évolué, selon la volonté du patronat, dans le sens d’une exploitation accrue du personnel. Il est bien connu que les salaires dans la vente sont généralement scandaleusement bas. Ce alors qu’ils sont payés pour un travail non seulement épuisant, mais dont la dureté a augmenté au cours des années. En 2010, ce secteur employait à Genève 20'249 per-sonnes. Ce chiffre est passé à seulement 14'331 personnes en 2019. Pendant ce temps, non seulement la quantité de travail n’a pas diminué, mais s’est accrue, de même que le nombre de tâche exigée pour chaque employé-e (parmi lesquels une majorité de femmes). Le personnel est aujourd’hui soumis non seulement à des pressions accrues, mais à des horaires irréguliers, sans jours de congés fixes ; des horaires communiqués souvent moins de 15 jours à l’avance. La fameuse « flexibilité », dans l’affreux jargon managérial. Autant dire que les salaires n’ont pas suivi. Grâce à cette exploitation record, le patronat fait des profits également records dans ce secteur, même pendant la période du Covid. Ce alors que le personnel de la vente, en première ligne pendant la pandémie, a souvent été au chômage partiel, ne touchant que 80% de salaires déjà trop bas, et n’a reçu que des applaudissements en guise remerciement.

 

Mais le patronat n’en a jamais assez, et veut faire travailler le personnel encore plus, en rallongeant la journée de travail le sa-medi. Ils affirment que ce n’est en réalité pas une hausse de la charge de travail, vu que la nocturne du jeudi soir serait supprimée. Mais cette pseudo compensation n’en est pas une, vue que la nocturne n’est pas rentable, car presque aucun client n’y vient. Le samedi, cependant, est le jour le plus chargé de la semaine. Étendre les horaires d’ouverture le samedi reviendrait non seulement à rendre ce travail encore plus fatigant, mais à compliquer davantage la vie de famille et la vie sociale, pour des personnes qui rentreraient trop tard le soir, et complètement épuisées. Rappelons d’ailleurs que les horaires ont d’ores et déjà augmenté ces dernières années. On en parle moins, mais les magasins ouvrent en moyenne plus tôt le matin qu’auparavant, sans engagement de personnel supplémentaire, mais en flexibilisant et en pressurant encore plus le personnel existant. Une tendance qui ne ferait que s’aggraver avec cette modification de la LHOM.

 

Le secteur du commerce de détail n’est absolument pas en difficulté, bien au contraire même. Pourtant le patronat prétend que cette extension des horaires d’ouverture serait indispensable pour pouvoir lutter contre la con-currence du tourisme d’achat et du commerce en ligne. Mais les horaires d’ouverture n’y sont pour rien (honnêtement, qui va faire ses courses en France le samedi entre 18h00 et 19h00 ?). La cause principale des achats en France voisine ou en ligne est la différence de prix. Si le pouvoir d’achat de la population n’augmente pas, elle ne renoncera pas (ni ne pourra guère se le permettre) à cette marge d’économies. Le secteur auquel le grand patronat de la vente pourra en revanche faire concurrence avec cette modification de la LHOM serait…le petit commerce, qui peut ouvrir sur des horaires plus étendus. Qu’en disent les prétendus défenseurs des PME de la droite ? Combien d’emplois perdus ?

 

Et, parlons-en du commerce en ligne. Les profits indécents d’Amazon sont dus, comme il est universellement connu, à une exploitation de son personnel digne du XIXème siècle. Ce qui a permis à Jeff Bezos d’amasser une fortune proprement vertigineuse, pour pouvoir ensuite s’envoyer dans l’espace, pour se permettre encore à son retour de nous donner des leçons de pré-servation de la planète, alors que peu d’entreprises sont aussi écocides que la sienne. Le patronat voudrait imposer ce « modèle Amazon », ce retour au capitalisme sauvage d’avant toutes les conquêtes de la classe ouvrière, à toutes les travailleuses et à tous les travailleurs. Parce que nous n’en voulons pas, il faut refuser cette modification de la LHOM.

9 novembre 2021 : discours prononcé au nom du Parti du Travail



Commémorer le 9 novembre 1932, ce n’est pas seulement se rappeler du passé en tant que passé, mais en tant que leçon et avertissement pour le présent et l’avenir. En particulier, se rappeler de ce jour où l’armée tira sur la foule, faisant 13 morts, est important pour comprendre et combattre le danger du militarisme, arme entre les mains des puissances impérialistes pour opprimer les peuples à l’intérieur comme à l’extérieur de leurs frontières, et une menace pour l’existence même de l’humanité.

 

L’impérialisme n’a pas changé de nature, ni ne peut en changer. Il est par essence agressif, porté à l’usage de la force meurtrière pour imposer sa domination, déposséder les peuples de leurs ressources. Aujourd’hui, hélas, l’heure n’est pas à la détente, bien au contraire. La planète est ensanglantée par des guerres, souvent orchestrées à distance par les puissances impérialistes. La tendance est à la course aux armements – pour laquelle des ressources précieuses, que nous savons pourtant finies, sont gaspillées en quantités astronomiques – et à la militarisation.

 

Malgré la tragique débâcle de sa guerre en Afghanistan, l’OTAN demeure un bloc militaire agressif, qui s’arroge la prérogative, on ne sait trop de quelle droit, d’intervenir partout sur la planète. La puissance impérialiste sur le déclin que sont les USA est prête à tout pour maintenir son hégémonie. La stratégie agressive de l’impérialisme étatsunien de tension avec la République populaire de Chine et la Fédération de Russie, l’escalade verbale et les provocations, constitue une menace majeure pour la paix mondiale, et pourrait, dans le pire des scénarios, dégénérer en déflagration globale. Le blocus criminel des USA contre la République de Cuba, ses ingérences, ses guerres hybrides contre les peuples d’Amérique latine qui refusent de subir le joug de l’Empire doivent en particulier être dénoncés et combattus.

 

La situation ne s’est pas améliorée depuis que Joe Biden a remplacé Donald Trump. L’alliance militaire AUKUS entre les USA, le Royaume-Uni et l’Australie constitue un dangereux pas supplémentaire dans l’aggravation de la tension militaire dans le Pacifique. L’acquisition de sous-marins à propulsion nucléaire par l’Australie représente une escalade de plus dans la course aux armements, lourde de dangers.

 

Inutile de dire que l’impérialisme ne se préoccupe en réalité nullement de la démocratie et des droits humains. L’OTAN ne trouve rien à redire des crimes de guerre de l’un de ses membres, la Turquie d’Erdogan. Les USA n’ont aucun problème avec les régimes autoritaires « amis », sans parler de leurs propres – et innombrables – violations des droits humains. Ce n’est qu’une question d’intérêts des grands monopoles, de contrôle des ressources et de domination. Les puissances impérialistes n’ont également aucun respect, même minimal, des droits humains des personnes qui doivent fuir leur pays du fait de leurs guerre, et des ravages de leur domination. Des personnes avec qui nous devons également être solidaires. Dans l’immédiat, je vous appelle à signer le référendum contre le financement par la Suisse de Frontex, cette criminelle police européenne des étranges.

 

Nous devons exiger le respect du droit international, le respect des peuples pour le droit à disposer d’eux-mêmes, lutter pour un désarmement global. Aujourd’hui comme hier, la lutte pour la paix passe par la lutte contre l’impérialisme.

08 novembre 2021

Discours de clôture au XXIVème Congrès du PST-POP


 

Chères et chers camarades,

 

Je vous remercie de l’honneur que vous m’avez fait, de la confiance que vous m’avez témoigné en m’élisant à la coprésidence – avec Amanda Ioset - de notre Parti. Je saurai me montrer digne de cet honneur, et m’efforcerai d’être à la hauteur de la tâche que le Parti m’a confiée.

 

Avant toute chose je tiens à rendre hommage à mon prédécesseur, Gavriel Pinson, qui a servi le Parti avec honneur pendant de longues années, et qui a accompli du très bon travail durant son mandat de président, contribuant grandement à redonner vie et activité aux instances nationales du PST-POP, à en dynamiser le travail, à renforcer la cohésion, l’organisation, l’unité idéologique et le niveau de nos analyses politiques. C’est durant son mandat que nous avons notamment élaboré notre analyse critique de la voie bilatérale dans les relations entre la Suisse et l’UE ; construit un programme électoral qui, par sa complétude, son ancrage idéologique marxiste, et sa solidité politique, se rapproche le plus d’un programme politique dont nous avons absolument besoin parmi tous les textes que le Parti a publié durant trois décennies ; et mené à bien nombre d’autres tâches politiques. Nous avons retrouvé un siège au Conseil national, et le Parti s’est globalement renforcé durant cette période. Nous tenons ainsi notre Congrès dans le canton du Valais, où notre Parti compte désormais une nouvelle et très dynamique section cantonale. Nous avons également reconstitué une section à Bâle, et bientôt compterons officiellement une section en Argovie. Une dynamique positive a pu être attestée dans pratiquement toutes les sections cantonales de notre Parti. Il est vrai bien sûr que beaucoup reste encore à faire, et que le dynamisme des instances nationales a malheureusement baissé ces derniers temps. Il est l’heure aujourd’hui de passer à un niveau qualitativement supérieur par rapport à tout ce qui a été réalisée jusque-là.

 

Notre XXIVème Congrès touche à sa fin. Un Congrès qui aura été constructif, et dont les travaux auront été, j’en suis convaincu, utiles pour l’avenir de notre Parti. Ces travaux ont porté, vous le savez, sur l’amélioration de la communication de notre Parti, et sur le renforcement de son organisation, et plus précisément de son organisation en tant que parti de travailleuses et de travailleurs. Cette tâche est essentielle. Car, comme l’écrivait Lénine :

 

« Le prolétariat n’a d’autre arme dans la lutte pour le pouvoir que l’organisation…Le prolétariat peut devenir – et deviendra inévitablement – une force invincible pour cette seule raison que son union idéologique basée sur les principes du marxisme est cimentée par l’unité matérielle de l’organisation qui groupe les millions de travailleurs en une armée de la classe ouvrière »

 

En tant que disciples de Marx, Engels et Lénine, nous sommes convaincus que la forme supérieure d’organisation de la classe ouvrière, c’est le parti politique. Ceci dit, l’organisation et a fortiori la communication ne sont pas des buts en soi, mais sont au service de la ligne politique, de la cause pour laquelle nous luttons. Cette cause, quelle est-elle ? Il y a déjà bien longtemps, en 1943, avant même la fondation officielle de notre Parti, les militants qui allaient le faire vivre devaient lutter dans la clandestinité, face à un Conseil fédéral objectivement aligné sur le Troisième Reich. Cette organisation clandestine publiait des journaux et des brochures, qu’elle faisait circuler sous le manteau. Il était écrit en conclusion d’une de ces brochures, intitulée La classe ouvrière et les événements :

 

« Nous arrivons, chez nous, comme d’ailleurs dans toute l’Europe occidentale et dans le monde entier, au moment où le mouvement prolétarien (par quoi il faut comprendre l’ensemble des hommes et femmes ne pouvant compter que sur leur travail pour vivre) représente l’immense majorité du peuple. En conséquence, la classe dirigeante et capitaliste suisse avec son cortège de parasites (chefs de partis, politiciens, journalistes, « intellectuels » traîtres à la cause du peuple, magistrats, hauts fonctionnaires de police, etc. – doit nécessairement céder la place aux représentants de l’immense majorité populaire actuellement en formation.

 

Le devoir des travailleurs suisses politiquement éduqués est de donner une ferme direction doctrinale à cette majorité populaire. C’est ainsi qu’il sera possible d’assurer au pays suisse son indépendance nationale menacée par le fascisme, avec lequel la bourgeoisie réactionnaire a lié partie, et sa libération sociale. Ainsi s’instaurera un système gouvernemental duquel la lutte entre la classe dirigeante et la classe opprimée aura été bannie par la suppression du régime des classes, but du socialisme digne de ce nom ».

 

Notre Parti fut fondé en 1944 pour faire de cette perspective une réalité. Malgré toutes les vicissitudes de l’histoire, malgré tous les changements que la Suisse et le monde ont connu depuis cette perspective demeure plus que jamais juste et nécessaire. C’est cette conviction qui nous unit, et nous donne la volonté de continuer la lutte. Aujourd’hui, notre Parti doit faire face à des défis et des enjeux cruciaux. Je n’en citerai que quelques-uns.

 

Premièrement, ainsi qu’il est mentionné dans les documents du Congrès, nous devons produire une analyse de la crise économique, sociale, écologique et démocratique, dans laquelle le capitalisme mondial a été plongé par la pandémie du Covid 19 ; et de combattre ces conséquences néfastes sur les travailleurs et les travailleuses, sur les classes populaires ; de montrer que la seule voie de sortie des crises du capitalisme passe par la sortie du capitalisme, qui est leur cause, par la transition au socialisme. Cette crise a démontré toute la vulnérabilité et les aberrations du système capitaliste. Elle est à ce jour loin d’être terminée. La reprise s’est révélée équivoque et minée par les pénuries, les goulots d’étranglement, les phénomènes inflationnistes qui en résultent. La probable fin des politiques monétaires expansionnistes pourrait plonger l’économie dans la récession. Il n’est pas simple de voir comment cette crise va évoluer. Une chose est sûre : il s’agit d’une crise structurelle, d’un tournant historique, non d’un simple épiphénomène. Le Parti devra l’analyser, et proposer des solutions politiques.

 

Ce qui est sûr en revanche, c’est que la bourgeoisie s’emploie à faire payer la crise au peuple, par des nouvelles mesures d’austérité, tout en baissant au passage encore plus les impôts pour elle-même – la fameuse « théorie du ruissellement », dont l’efficacité économique est nulle, et dont le seul effet est de faire ruisseler l’argent dans les poches de l’oligarchie. AVS 21, démantèlement des retraites sur le dos des femmes, d’un côté, et abolition du droit de timbre, cadeau fiscal scandaleux au grand capital, de l’autre. Nous devons combattre résolument cette politique, et proposer des solutions alternatives à celles de la bourgeoisie, en faveur des travailleuses et des travailleurs, des classes populaires.

 

J’ai parlé d’analyse. Il est en effet fondamental de fonder tout notre travail politique sur un développement créatif de la théorie marxiste, pour comprendre les enjeux du présent, et tracer les voies de l’avenir. Ce travail théorique est fondamental – s’en tenir à la seule politique « concrète », étroitement pragmatique, signifierait errer dans les ténèbres, avec des conséquences politiquement graves. Ainsi que l’écrivait l’ancien secrétaire général du PCUS, Youri Andropov :

 

« Toute sous-estimation du rôle de la science marxiste-léniniste et de son développement créateur, une interprétation pragmatique étroite de ses tâches, le mépris des problèmes fondamentaux de la théorie, la prédominance des considérations conjoncturelles ou la théorisation scolastique sont lourds de graves conséquences politiques et idéologiques. L’expérience a prouvé à maintes reprises combien Lénine avait raison de dire : « celui qui s’attaque aux problèmes particuliers avant d’avoir résolu les problèmes généraux, “butera“ inévitablement, à chaque pas, sans même s’en rendre compte, sur ces problèmes généraux. Or, buter aveuglément sur eux dans chaque cas particulier, c’est condamner sa politique aux pires errements et à l’abandon des principes. »

 

Il est essentiel d’avoir une approche créative du marxisme, de le développer sans cesse pour comprendre les phénomènes nouveaux, et pas simplement s’en tenir aux acquis. Comme l’écrivait Boris Ponomarev, secrétaire du CC du PCUS et membre suppléant du Politbureau :

 

« La théorie marxiste-léniniste étudie les lois générales de développement de la société humaine. C’est une arme idéologique de la classe ouvrière, des travailleurs de tous les peuples. C’est ce qui fait sa portée universelle. De sa nature même découle une exigence d’approche créatrice envers l’étude de tous les phénomènes et de tous les processus qui se déroulent dans la société, dans chaque pays, à chaque étape historique de son développement. Analysant de façon scientifique le passé, cette théorie sert le présent et est tournée vers l’avenir. »

 

Un autre enjeu central du moment sont les relations entre la Suisse et l’Union Européenne. Notre Parti a fort justement élaboré une analyse critique de l’UE elle-même, en tant que Saint-Empire capitaliste ordolibéral et essentiellement antidémocratique, une chape de plomb néolibérale ayant pour but d’imposer les intérêts des monopoles aux peuples. Nous avions tout aussi justement procédé à une critique de la voie bilatérale, qui est une sorte de semi-adhésion de la Suisse à l’UE, et une reprise des règles néolibérales du marché commun dans le droit suisse, ainsi que de l’accord-cadre, qui aurait impliqué une reprise quasi automatique par la Suisse de l’ « acquis » communautaire. Mais la réalité a changé depuis, nous obligeant à reprendre notre travail d’analyse. Depuis le renoncement du Conseil fédéral à signer l’accord-cadre, la voie bilatérale semble condamnée à s’effriter progressivement, puisque l’UE refuse de la prolonger sans « solution institutionnelle ». Le Conseil fédéral n’a apparemment pas de plan clair, et l’avenir des relations entre la Suisse et l’UE est aujourd’hui l’enjeu d’une bataille politique. Notre Parti, seul parti de gauche à avoir procédé à cette analyse critique de l’UE, se doit de proposer un plan crédible d’un avenir en dehors du carcan d’un grand marché libéralisé, dont les conséquences sociales et écologiques sont dévastatrices.

 

En parlant de politique internationale, nous devons plus que jamais rester fidèles aux principes de l’internationalisme prolétarien, de continuer à soutenir avec encore plus de détermination la Révolution cubaine, le Venezuela bolivarien, le processus du changement en Bolivie, tous les peuples en lutte pour leurs droits, pour le progrès social, pour leur émancipation et pour le socialisme. L’internationalisme implique aussi le devoir de solidarité avec toutes les personnes que les guerres et les ravages du capitalisme forcent à fuir leur pays, et face auxquelles l’Europe se barricade et renforce sa scandaleuse police des étrangeres Comme l’écrivait Karl Marx dans l’Adresse inaugurale de l’AIT : « L’expérience du passé nous a appris comment l’oubli de ces liens fraternels qui doivent exister entre les travailleurs des différents pays et les exciter à se soutenir les uns les autres dans toutes leurs luttes pour l’affranchissement, sera puni par la défaite commune de leurs entreprises divisées ». Depuis le tragique tournant des années nonante, le mouvement communiste international est désorganisé et affaibli. Seules les forces de la réaction en profitent. Notre Parti doit contribuer à la reconstruction d’un mouvement communiste international puissant et capable d’accomplir sa mission historique. C'est pourquoi nous sommes très heureux de la présence à notre Congrès de représentants de cinq partis frères, et tâcherons de développer cette coopération internationale.

 

Puisque nous sommes en pleine COP26 et que la Grève du climat organise une manifestation contre les bavardages vains des COP et pour exiger un vrai changement, il convient d’en dire quelques mots. La question est en effet cruciale. La situation est aujourd’hui urgente et dramatique. Les effets du changement climatique sont d’ores et déjà catastrophiques…et au lieu d’y faire réellement quelque chose, l’humanité court à la catastrophe. Depuis des années les décideurs bourgeois bavardent, font de vaines promesses, essayent encore de trouver des sources de profits supplémentaires sur la « transition écologique », prônent un impossible et contradictoire « capitalisme vert ». Mais toutes leurs belles paroles n’empêchent pas que les émissions de gaz à effet de serre continuent régulièrement à augmenter. Le problème est que pour mettre fin à cette course à l’abîme, il faudrait mettre fin à sa cause : le capitalisme et son exigence de profit maximum à tout prix. Ainsi que le déclarait Evo Morales en 2007 : « Le monde souffre d’une fièvre provoquée par le changement climatique, et la maladie est le modèle capitaliste de développement ». Heureusement, pour être mortelle, cette maladie n’est pas incurable. Le socialisme est le remède.

 

Nous sommes le 7 novembre aujourd’hui, le 104ème anniversaire de la Grande Révolution Socialiste d’Octobre. Il y a exactement 104 ans, pour la première fois dans l’histoire, un État prolétarien, un État de la classe ouvrière voyait le jour. Cet État, le pays des Soviets, allait durer un peu plus de septante ans, changeant le visage de la planète à jamais. Par un heureux hasard, la salle où nous nous réunissons s’appelle salle du Kremlin, qui fut le siège du pouvoir des soviets. Bien que l’histoire se révéla complexe, et souvent tourmentée, le socialisme fut une réalité – qui concerna jusqu’à un tiers de la population de la Terre – et ses accomplissements, ses réalisations furent, somme toute, remarquables, et rien ne saurait les minorer. Peu avant la contre-révolution qui allait la balayer, l’Union soviétique avait atteint des sommets inconnus auparavant, la civilisation la plus avancée, la plus progressiste – même si bien sûr beaucoup restait à faire – que l’humanité ait jamais connu. Le renversement du socialisme dans la plupart des pays qui l’avaient édifié laissa un vide, et ouvrit la porte à une régression terrible, une réaction dont les méfaits sont sans nombre.

 

Cette grande révolution fait indiscutablement partie de notre histoire, de notre tradition. Notre Parti s’inscrit clairement dans l’héritage de ce parti d’un type nouveau, le Parti bolchevik, qui le premier a guidé la classe ouvrière vers la victoire et la construction d’une société nouvelle ; dans l’héritage, théorique et pratique, du mouvement communiste international, dont nous sommes un membre à part entière. C’est un héritage auquel nous devons rester indéfectiblement fidèles, que nous devons enrichir – en tenant compte également des difficultés et des échecs du passé – pour comprendre le présent et le transformer. Parce que le marxisme-léninisme est la seule tradition de pensée, la seule idéologie scientifique qui éclaire les chemins de l’avenir, et parce qu’une rupture avec l’ordre établi, une sortie de la voie sans issue du capitalisme, l’édification du socialisme, n’ont jamais été aussi nécessaires et urgents.

 

Les grévistes pour le climat, les scientifiques du GIEC même, appellent à un changement de système pour arrêter la catastrophe en cours. Le slogan « changeons le système, pas le climat » est parfaitement juste. Mais ce changement ne viendra pas de lui-même, ni de la bonne volonté des dirigeants bourgeois, ni d’un mouvement simplement revendicatif. Seule l’action résolue d’un parti politique d’avant-garde, se fondant sur le marxisme, et ayant le socialisme pour perspective, pour y parvenir. C’est pourquoi, nous devons lutter résolument pour cette finalité. Certes, la lutte est difficile, et la réalité suisse ne semble prima facie guère nous être favorable. Ce n’est pas pour autant que notre lutte n’aboutira pas. Comme l’écrivait Jean Jaurès :

 

« Il faut l’effort lent et continu pour triompher ! Cependant la victoire est certaine, parce qu’il serait monstrueux et inadmissible que l’humanité ait pu concevoir un idéal de justice et qu’elle soit incapable de le réaliser. Cette faillite humaine ne se réalisera pas ! »

 

Je conclurai en reprenant l’explicit du rapport de l’ancien secrétaire général de notre Parti, Jean Vincent, au IXème Congrès du Parti Suisse du Travail, les 2 et 3 novembre 1968 : 

 

« Que grandisse, que prospère notre Parti du Travail qui porte le plus beau nom qui soit et le plus éloquent, justement parce qu’il est le nom d’un rassemblement du peuple travailleur, qu’il aille d’expérience en expérience, de progrès en progrès, de succès en succès !

 

Vive notre Parti du Travail !

 

Vive le socialisme que nous voulons édifier en Suisse !

 

Vive le communisme ! »