04 octobre 2009

Crise du capitalisme


Le texte qui suit est le premier chapitre du programme électoral rédigé par le Parti du Travail genevois pour les élections cantonales de cet automne, mais il est toutefois aussi un programme politique allant bien au-delà des quatre ans de législature. Le programme a été rédigé par la commission politique du PdT dont je suis le président; pour voir la mise-en-page originale, suivez ce lien. Les quelques articles que j'ai publié aujourd'hui sont les différents chapitres du programme. L'analyse préliminaire sur la crise du capitalisme est de ma plume.

Depuis quelques mois, le capitalisme vit sa plus grande crise depuis 1929, probablement la pire crise de son histoire. L’économie est en récession, de plus en plus d’entreprises font faillite et licencient en masse, le Bureau International du Travail prévoit 50 millions de chômeurs de plus pour cette année. Selon toute vraisemblance, et selon toutes les analyses sérieuses, cette crise devrait durer encore au moins quinze ans ; il n’y a pas de raison d’ailleurs qu’une crise de telle ampleur dure moins, celle de 1929 ne s’est achevée qu’avec la Seconde Guerre mondiale. Celle que nous vivons actuellement a éclaté avec les subprimes américains, pour s’étendre à toute la finance de ce pays, puis à toute l’économie mondiale. Actuellement, l’économie suisse commence à être touchée par la récession et les vagues de licenciements, telles que l’affaire Franck Muller, le taux de chômage a augmenté de 60% en 12 mois et le nombre de faillites d’entreprises de 26,2% ; et ce n’est là que le début, selon toutes les prévisions, le pire de la crise est devant nous. Thomas Daum, directeur de l’Union patronale suisse, a d’ailleurs clairement annoncé quel avenir les maîtres du capital préparent pour les travailleurs : «ça ira mal à la rentrée, des décisions comme celle de Frank Muller, il y en aura certainement une par mois».
Il s’agit là, bien plus que de l’éclatement d’une simple bulle spéculative, d’une crise structurelle du capitalisme. La cause en va donc bien au-delà de l’incompétence de quelques managers ; la crise est le résultat nécessaire du mode d’accumulation du capitalisme qui tend à produire toujours plus sans augmenter les salaires en conséquence afin de pouvoir garder toujours des profits maximums, jusqu’à obtenir des masses de produis invendables qui précipitent l’économie entière dans la récessions et les travailleurs dans la misère ; l’excès de richesses cause la misère généralisée, là est l’absurdité profonde du système. Selon Atilio Borón, docteur en sciences politiques, professeur titulaire de théorie politique et sociale, directeur du Programme latino-américain de télé-enseignement en sciences sociales (PLED) : « il s'agit d'une crise de surproduction doublée d'une crise de sous-consommation. Ce n'est pas par hasard qu'elle a éclaté aux États-Unis puisque ce pays vit artificiellement, depuis plus de trente ans, de l'épargne extérieure et du crédit extérieur, deux choses qui ne sont pas infinies : les entreprises se sont endettées au-delà de leurs possibilités ; l'État s'est endetté lui aussi au-delà des siennes pour faire face non à une guerre, mais à deux, non seulement sans augmenter les impôts, mais même en les réduisant, tandis que les citoyens sont systématiquement poussés par la publicité à s'endetter pour soutenir une surconsommation effrénée, irrationnelle et gaspilleuse. » La financiarisation de l’économie, bien loin d’apporter la croissance perpétuelle que promettaient les pseudo-experts néolibéraux, n’était qu’un moyen de retarder la crise de surproduction en faisant consommer les gens à crédit, c’est-à-dire en s’endettant, et en utilisant leurs dettes comme produits financier (dont la valeur était assurée par l’hypothèse que les débiteurs allaient pouvoir les rembourser, avec lesquels jouer en bourse. Mais ce monopoly n’a fait que retarder un peu la crise pour qu’ensuite elle ne fasse qu’éclater avec plus de violence lorsque les gens ne pouvaient plus payer ne serait-ce que les intérêts de leurs dettes.

Pendant des années, les maîtres du monde et leurs « experts » autoproclamés ont imposé aux peuples des politiques néolibérales de dérégulation de l’économie, de privatisations et de liquidation des acquis sociaux obtenus par des décennies de lutte, sous prétexte que ces mesures étaient nécessaires à la bonne santé de l’économie. Or le néolibéralisme a conduit le capitalisme à une crise sans précédant, et aujourd’hui les chantres du « moins d’Etat » et de la « concurrence libre et non faussée » se disent tous « étatistes » et « keynésiens », et vantent à présent la régulation de la finance et l’intervention de l’Etat. Auraient-ils fait une indispensable autocritique ? Nullement ! Ils continuent de servir les mêmes intérêts, ceux des seigneurs du capital. Leur prétendu « plan de sauvetage » de l’économie, leur discours sur le fait que nous serions « tous dans le même bateau », ne sont de fait que la plus grande escroquerie de l’histoire. Ceux là même qui n’ont jamais voulu trouver les 82 milliards de dollars pour arrêter la faim et les épidémies dans le monde, qui ont prétendu que les modestes revendications sociales des travailleurs étaient impossible à satisfaire parce que « les caisses de l’Etat sont vides », ceux là mêmes ont soudain trouvé des sommes faramineuses à offrir à leurs banquiers en difficulté, sans prise de contrôle ni même droit de regard de l’Etat, ni aucune condition d’aucune sort, comme cadeaux pur et simple : 1'400 milliards d’euros, 700 milliards de dollars et 65 milliards de francs suisses !Par contre, pour les travailleurs, ils préconisent de se serrer la ceinture : du fait de la crise, les revendications sociales et salariales seraient irréalisables ; au contraire, il faut baisser les salaires, accepter les licenciements, baisser les retraites, couper encore et encore dans les déjà ridiculement faibles prestations sociales. Par exemple, Doris Leuthard, conseillère fédérale en charge du Département fédéral de l’économie, a tenu le 24 août une réunion à huis clos avec quelques «spécialistes» issus du milieu patronal, sans aucun représentant des travailleurs évidemment, sur le thème pour le moins surprenant «comment mettre à profit la crise» (c’est-à-dire comment augmenter encore les profits des actionnaires) ; d’ailleurs, elle annonce clairement la couleur : «discipline personnelle et dynamisme économique», c’est-à-dire plus d’exploitation et des baisses de revenus pour les salariés, qui doivent faire preuve de «discipline» et se serrer la ceinture pour que leur patron n’ait pas à baisser un tant soit peu son luxueux et démesuré train de vie.

C’est que les décideurs des Etats bourgeois sont au service justement de la bourgeoisie. Avec leurs « plans de sauvetage » ils veulent faire une chose très simple : renflouer les capitalistes avec les impôts des travailleurs, nous faire payer leur crise, prendre aux exploités l’argent investi actuellement dans les prestations sociales pour le donner aux banquiers. D’autant que ces cadeaux ne serviront pas à autre chose qu’à relancer la spéculation pour un round, avec comme issue de nouveau la crise. Les discours des décideurs sur la « relance » et la « moralisation » du capitalisme ne sont qu’hypocrisie. Car s’ils veulent sauver quelque chose, c’est bien le capitalisme, leur monde à eux, les conditions de leur richesse et de notre oppression. Or cette crise a amplement démontré l’incapacité du capitalisme, qu’il soit néolibéral ou régulé, à assurer ne serait-ce que les besoin les plus vitaux des peuples (près de 1 milliard de personnes sur terre souffrent de malnutrition ou de famine). Aussi le Parti du Travail n’est nullement intéressé à une «relance du capitalisme», tout simplement parce qu’il n’y a aucune raison de le relancer. Toutes les grandes entreprises fonctionnent comme société anonymes, sans propriétaire véritable (la majorité des actions étant généralement détenue par des fonds d’investissement), gérées par des cadres salariés. S’il existe encore une concurrence entre elles, il s’agit d’une concurrence entre monopoles et qui ne mène que trop souvent à des guerres impérialistes et à l’oppression néocoloniale. Dans ces conditions, poursuivre la production privée est une absurdité, mis à part pour les seigneurs du capital et leur richesse insolente. Il faut au contraire détruire cette société et ce système oppressif et gaspilleur pour construire à la place une société socialiste qui seule peut satisfaire les aspirations des peuples.

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