25 février 2010

Aimé Césaire sur la mort de Staline

















«J'ai passé sept jours à Moscou. Je suis arrivé dans la capitale soviétique pendant les journées de deuil, le lendemain de l'enterrement du généralissime Iossip Vissarionovitch Staline. Mais sa présence dans les pensées et les cœurs des gens était toujours perceptible. Des foules immenses emplissaient la place Rouge ; les innombrables gerbes apportées pour les obsèques du leader formaient une gigantesque colline de fleurs au pied du mur du Kremlin.

«La douleur des milliers et milliers de citoyens soviétiques témoigne de manière éloquente qu'il est dur pour eux de vivre la perte de leur meilleur ami.

«Staline est mort, mais tout autour parle de lui. La mémoire de Staline, ce n'est pas seulement la tristesse du peuple, c'est aussi une inébranlable détermination qui marque tous les visages, la détermination de protéger l'œuvre grandiose de Staline de toutes les atteintes ; c'est également l'unité indestructible du peuple soviétique qui s'est encore raffermie durant ces jours de malheur ; c'est sa volonté qui désormais va être concentrée sur la mobilisation de toutes ses forces pour achever l'ouvrage gigantesque d'un des plus grands bâtisseurs de l'Histoire.

«Tout, à Moscou, parle de la grandeur du leader défunt. Donc, qu'ai-je vu au cours de ces quelques jours ?

«J'ai vu un grand peuple blessé au cœur même, mais empreint de la détermination à ne pas plier sous le coup atroce du destin. C'est un grand peuple amoureux de l'art, de la science, de la culture, un grand peuple occupé par le travail, par la gigantesque édification de la paix. C'est un grand peuple fier d'être actuellement le conservateur des plus grands trésors de la civilisation : liberté, égalité, pain et lumière pour tous. Un peuple qui sait que, sous toutes les circonstances, l'avenir lui appartient.

«Je suis le fils d'un des plus petits peuples du monde, celui du peuple de la petite île de Martinique, une possession française qui se trouve non loin des côtes de l'Amérique centrale et que contemplent avec convoitise les magnats des États-Unis.

«Je suis le fils du peuple persécuté avec acharnement par les “chevaliers” du Ku Klux Klan. Je suis originaire d'un petit pays qui souffre sous le joug du régime colonial. Mais j'ai visité l'Union soviétique, et je sais que la cause de la paix et de la libération nationale, la cause pour laquelle se bat le peuple de ma patrie et les peuples opprimés dans toutes les parties du monde, triomphera, car elle est indissolublement liée aux grandes idées de Lénine et de Staline ! »

Aimé Césaire, écrivain noir de l'île de la Martinique

Source : Litératournaïa Gazéta (Journal littéraire), n° 34, 19 mars 1953, p. 4.

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