22 février 2019

Marxisme et réchauffement climatique

Notre Parti ne peut que saluer la mobilisation que représente la grève pour le climat, mobilisation qui aura eu le mérite indéniable d’imposer comme problématique urgente une menace extrêmement grave et beaucoup plus court terme que l’on ne croit trop souvent pour la survie même d’une civilisation humaine sur notre planète. Notre Parti alerte en effet depuis longtemps sur la menace que représente en réalité pour la survie même de l’espèce humaine à une échéance plus courte qu’on ne le croit généralement notre mode de production actuel et les changements climatiques qu’il engendre. Nous sommes d’ailleurs d’autant plus légitimés à nous engager sur la question qu’il ne s’agit pas pour nous d’une prise de conscience de la dernière heure. Contrairement à ce qu’on affirme parfois, les préoccupations écologiques ne sont en rien contraires au marxisme, ni une innovation au sein d’une théorie qui ne les incluait pas à l’origine, mais bien d’un aspect fondamental de la pensée de Marx et d’Engels. De fait, le marxisme offre tous les instruments conceptuels nécessaires pour penser la catastrophe climatique actuelle et les moyens de la conjurer, ce qui ne peut se faire en restant dans un cadre capitaliste.

Tout était déjà dit, au fond, par Friedrich Engels : « Là où des capitalistes individuels produisent et échangent pour le profit immédiat, on ne peut prendre en considération en premier que les résultats les plus proches, les plus immédiats. Pourvu qu’individuellement le fabricant ou le négociant vende la marchandise produite ou achetée avec le petit profit d’usage, il est satisfait et ne se préoccupe pas de ce qu’il advient ensuite de la marchandise et de son acheteur. Il en va de même des effets naturels de ces actions. Les planteurs espagnols à Cuba qui incendièrent les forêts sur les pentes trouvèrent dans la cendre assez d’engrais pour une génération d’arbres à café extrêmement rentables. Que leur importait que, par la suite, les averses tropicales emportent la couche de terre superficielle désormais sans protection, ne laissant derrière elle que les rochers nus ? Vis-à-vis de la nature comme de la société, on ne considère principalement, dans le mode de production actuel, que le résultat le plus proche, le plus tangible ; et ensuite on s’étonne encore que les conséquences lointaines des actions visant à ce résultat immédiat soient tout autres, le plus souvent tout à fait opposées ». (Friedrich Engels, Le rôle du travail dans la transformation du singe en homme, 1876)

Il ne s’agit pas non plus d’une dimension de la pensée des classiques qui aurait été ensuite oubliée par les communistes après la Révolution d’Octobre. Contrairement à la légende noire d’une URSS « productiviste » et aveugle aux dégâts infligés par la civilisation industrielle à l’environnement, la question écologique était en réalité prise au sérieux au pays de Lénine. A titre d’exemple nous citerons un extrait du Rapport présenté par V. Kirilline, vice-président du Conseil des ministres de l’URSS, au Soviet suprême de l’URSS en 1972 :

« L’atmosphère de notre planète est immense. Le poids de l’air atmosphérique est d’environ 5'000 billions de tonnes. On pourrait penser que les centaines de millions de tonnes de pollutions qui se sont répandues chaque année dans l’atmosphère et représentent moins de 0,0001% du poids de l’air atmosphérique, sont comme une goutte d’eau dans la mer. Or, c’est loi d’être le cas. Premièrement, avec le temps la quantité de substances polluant l’atmosphère s’accumule, deuxièmement les substances polluantes sont inégalement réparties et, en certaines endroits, leur concentration dépasse, dès maintenant, la limite admissible, et, troisièmement, des concentrations même faibles de certaines substances sont dangereuses. Les observations montrent que la teneur en gaz carbonique de l’atmosphère ne cesse de croître. De l’avis de certains savants, cela peut aboutir, par suite de ce que l’on appelle « l’effet de serre », à une élévation de la température de notre planète qui entraînerait la fonte des glaciers et d’autres conséquences indésirables ».

Il ne s’agit pas que de mots. V. Kirilline préconisait des mesures effectives pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. L’URSS ne fut certes pas toujours exemplaire en la matière, mais n’oublions pas qu’à cette époque cette problématique n’intéressait pratiquement personne parmi les décideurs bourgeois dans les pays capitalistes. Un lecteur critique pensera sans doute à la tragédie de la mer d’Aral. Celle-ci toutefois était due à l’aventurisme de Khrouchtchev, à sa volonté de dépasser les USA, ce qui conduisait, inévitablement, à prendre le capitalisme américain pour référence, et reproduire certains de ses pires défauts. Ce fut une des raisons d’ailleurs pourquoi le praesidium du CC du PCUS se résolut à le déchoir de ses fonctions dirigeantes. Le débat sur ces questions était réel en URSS. Des écrivains, notamment, ont pris position pour la protection de l’environnement.


Quoiqu’il en soit, les efforts, certes insuffisants, du socialisme pour bâtir une civilisation durable, contraste avec l’incapacité du capitalisme à faire quoique ce soit qui pourrait entraver l’accumulation du capital, même aujourd’hui, alors que la catastrophe est imminente. Rappelons d’ailleurs que Cuba est aujourd’hui le seul pays au monde qui a atteint les objectifs onusiens de développement durable. Plus que jamais, le combat pour une société socialiste est à la fois juste et urgent.

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