Paraît-il que la Suisse est le pays le plus démocratique de la planète, si ce n’est de la galaxie tout entière, que la volonté du peuple est sacrée chez nous, que le monde entier nous envie notre démocratie semi-directe…Oui, mais tout ça, ce n’est qu’une partie de la vérité, et c’est seulement quand ça les arrange. Eux ? Les représentants politiques de la bourgeoisie, classe sociale qui détient la réalité du pouvoir politique en Suisse, par-delà les contrepoids démocratiques et les droits populaires, comme dans n’importe quel pays capitaliste.
Et actuellement, ça ne les arrange plus du tout. C’est que le peuple a voté dans plusieurs cantons – Genève, Neuchâtel, Jura, Bâle-Ville, Tessin – pour l’introduction d’un salaire minimal interprofessionnel cantonal. La droite a fait campagne contre, et a perdu. Mais le patronat et ses relais politiques ne comptent nullement accepter ce résultat, ni s’arrêter devant un « détail » aussi insignifiant qu’un scrutin démocratique.
Aussi, le conseiller aux États obwaldien Erich Ettlin, du Centre, a déposé une motion pour démanteler les salaires minimaux cantonaux. Ce au nom d’un argument des plus spécieux : le partenariat social. La motion Ettlin implique que les Conventions collectives nationales, soit un contrat privé entre « partenaires sociaux », primeraient sur les salaires minimaux légaux cantonaux. Certes, rien ne changerait pour les secteurs non conventionnés, mais beaucoup de travailleuses et travailleurs parmi les plus modestes à Genève pourraient voir leur salaire baisser, et perdre de l’ordre de 1000,- par an !
C’est tellement scandaleux que même le Conseil fédéral était opposé à cette honteuse motion.
Pourtant, contre l’avis du Conseil fédéral, les deux chambres ont voté la motion Ettlin. Le Conseil fédéral devra donc revenir avec un projet de loi, d’abord mis en consultation, et qu’il faudra combattre par référendum s’il est finalement adopté.
Tous les conseillers nationaux genevois du PLR, du Centre (ex-PDC) et de l’UDC ont voté pour cette scandaleuse motion (ceux de gauche et des verts’libéraux ayant voté non), qui est passée à deux voix près ; s’ils avaient au minimum respecté la volonté clairement exprimée de leurs électeurs, celle-ci aurait été enterrée.
En pleine crise du coût de la vie, la droite ne trouve donc pas d’autre combat que celui de baisser des salaires déjà très modestes. Les différences salariales d’un canton à l’autre engendreraient une « insécurité juridique », à ce qu’il paraît. Quelle insécurité terrible que de devoir payer dignement les travailleuses et travailleurs ! Quant à l’insécurité matérielle que représente les fins de mois difficiles, ces gens-là n’en savent rien, ni n’en veulent rien savoir.
Ils prétendent tenir au partenariat social, mais en réalité, ils n’y pensent que quand cela les arrange. Rappelons que le patronat de la construction avait fait du chantage du type : vous acceptez de travailler 50 heures par semaine en plein été, ou on ne renouvelle pas la CCT. Seules les grèves l’ont fait reculer. Magnifique partenariat social ! Quant à la démocratie, l’UDC s’époumonne à hurler que la volonté du peuple est sacrée, lorsqu’il s’agit de l’une de ses initiatives ; mais lorsqu’il est question de cette scandaleuse motion, de l’achat des FA35 alors qu’une initiative populaire venait d’être déposée, de l’article constitutionnel sur l’AVS toujours pas pleinement appliqué depuis 1947, c’est autre chose…
Mais foin de démagogie et de faux prétextes. Ce honteux combat de la droite pour baisser les salaires les plus bas rappelle qu’elle n’en a rien à faire en réalité ni de la démocratie ni du partenariat social, et que, derrière toutes ses belles paroles, sa seule raison d’être est de servir les intérêts égoïstes de la classe qu’elle représente : la bourgeoisie.
Ce qui rappelle, s’il le fallait vraiment, que la lutte des classes n’est pas une invention des marxistes mais une réalité objective, et que, de son côté, la bourgeoisie la mène, avec une brutalité consommée et un cynisme sans bornes. Les travailleuses et travailleurs doivent en faire de même, sous peine de se faire piétiner. Ils doivent être capables de voir dans le patronat et les partis bourgeois, non des « partenaires sociaux », mais ce qu’ils sont objectivement : des ennemis de classe. Pour les combattre, ils disposent de leur propre Parti, qui a été fondé dans ce but : le Parti du Travail.
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