19 novembre 2020

Le peuple chilien brise les chaînes de la constitution de Pinochet

 



Le 4 novembre 1970, Salvador Allende était élu président du Chili. Le début de ce qui aurait pu être une expérience de construction du socialisme par la voie pacifique et démocratique, tout en s’appuyant sur les luttes populaires. Trois ans plus tard, le président Allende était renversé par un coup d’Etat réactionnaire, organisé par le commandement militaire chilien, sous les auspices des USA. Commençait alors la longue nuit de la dictature du général Augusto Pinochet.

 

Ce que le grand public connaît moins, c’est que cette dictature assassine fut aussi le premier gouvernement au monde à imposer les recettes empoisonnées du néolibéralisme, des recettes qui ne pouvaient précisément alors, avant la grande vague réactionnaire des années 80-90, être imposées à un peuple que par la contrainte du despotisme. Les grands idéologues du néolibéralisme soutinrent ardemment la dictature de Pinochet. Milton Friedman travailla pour ce régime.

 

Friedrich Von Hayek déclarait dans une interview donnée au journal chilien Mercurio, en 1981 :

 

« Je suis complètement contre les dictatures comme solutions pour le long terme. Mais parfois une dictature peut être nécessaire pour une période de transition. A certains moments, un pays peut éprouver le besoin d’un gouvernement dictatorial. Vous comprenez qu’un dictateur peut régner d’une façon libérale tout comme un démocrate peut régner d’une façon non-libérale. Personnellement je préfère un dictateur libéral à un régime démocratique sans libéralisme... »

 

On se demande pourquoi le PLR, tout acquis à la pensée de Von Hayek et de Friedman, n’est pas fier de se réclamer de ce grand « dictateur libéral »…

 

Avant de quitter le pouvoir et de permettre un « retour à la démocratie », Pinochet imposa à son peuple, en 1980, une constitution qui grave le néolibéralisme dans le marbre, et qui est toujours en vigueur aujourd’hui. Une constitution qui limite drastiquement l’action sociale de l’Etat (pas l’action policière évidemment), et laisse largement entre les mains du privé – qui est, n’en déplaise aux libéraux, plus cher, et beaucoup moins efficace que le public – des domaines comme l’éducation, la santé et les retraites.

 

Sauf que ce ne sera bientôt plus le cas. Ce 25 octobre 2020, le peuple chilien s’est prononcé, à 77,65% des voix, pour une nouvelle constitution. La rédaction de celle-ci sera confiée à une Convention constituante, composée de citoyens élus à cet effet, sur une base paritaire.

 

Ce changement ne fut aucune concédé par la bourgeoisie chilienne. Il fut arraché par le peuple, après des mobilisations de masse durant plusieurs mois, à partir de la grande révolte du 25 octobre 2019, contre le président de droite Sebastian Piñera et sa politique néolibérale, après des décennies de luttes difficiles et courageuses de la classe ouvrière, des peuples autochtones, des femmes, des étudiants…des luttes pour sortir d’un régime néolibéral et extractiviste, qui exploite aussi brutalement l’humain que la nature. La détermination du peuple a pu venir à bout de la répression brutale utilisée par un régime qui est le digne successeur de la dictature de Pinochet : le régime de Piñera n’a en effet pas hésité devant l’usage de la torture, le fait de tirer à balles réelles, ni de tenter de disperser les manifestations avec de la soude caustique.

 

Le peuple chilien a prouvé une nouvelle fois que la lutte vient à bout de toutes les réactions et de toutes les dictatures. L’élection de la Convention constituante ouvre la possibilité d’une rupture avec l’héritage sinistre de Pinochet, de la rédaction d’une constitution démocratique et de progrès social. Ce n’est qu’en restant vigilant, en ne baissant jamais les bras, et ne cessant jamais la lutte que le peuplr pourra être sûr de ne pas être dépossédé de sa victoire.

 

Le peuple chilien a enfoncé un clou dans le cercueil de l’héritage politique de Pinochet avec son vote. C’est un jour véritablement historique, dont la portée ne peut être sous-estimée. Pour enterrer, totalement et définitivement, cet héritage de sinistre mémoire, au Chili et partout sur la planète, il convient également de se débarrasser de celui de ses inspirateurs, les idéologues du néolibéralisme. Et surtout, reprendre l’élan que son coup d’Etat est venu briser : la rupture avec le capitalisme, l’édification du socialisme. Ce n’est que lorsque le capitalisme aura laissé partout place à une nouvelle société socialiste sur la Terre, qu’Augusto Pinochet, Friedrich Von Hayek et Milton Friedman appartiendront définitivement au passé.

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