Contrairement à ce que l’intitulé du second objet cantonal en votation le 29 novembre prochain laisserait penser, il ne s’agit pas de changer l’affectation de terrains agricoles, pour y construire quelque chose. L’objet en question est un peu particulier.
L’objectif de ce projet de loi est de déclasser trois hectares de zones agricole en zone industrielle, au lieu dit « Sous-Forestal », situé sur le territoire de la commune d’Avusy, à la frontière des communes de Cartigny, Laconnex et Soral. Bien que situé en zone agricole, ce terrain n’est plus utilisé depuis une trentaine d’années pour l’agriculture. Il était exploité comme carrière de sable, jusqu’à son épuisement. Ensuite, le Conseil d’Etat permit à l’entreprise exploitante, la société Sablière du Cannelet SA, de se reconvertir dans le recyclage de déchets de chantier, en lui promettant une légalisation de son activité. Cela aurait impliqué de déclasser le terrain en zone industrielle, ce qui ne fut pas fait jusqu’à présent. L’activité de recyclage se poursuivait donc illégalement, mais était tolérée en pratique. Une majorité du Grand Conseil veut aujourd’hui légaliser cette situation, en déclassant ces trois hectares en zone industrielle.
Le projet de loi fut voté par la majorité des partis au Grand Conseil, à l’exception d’Ensemble à Gauche et d’une moitié des Verts. Ce sont les communes concernées qui sont à l’origine du référendum. La droite appelle à voter OUI, et la gauche, majoritairement, à voter NON. Les associations de défense de l’environnement sont divisées sur la question.
Il y a des arguments sérieux pour le OUI. La Sablière du Cannelet est responsable du recyclage de 25% des déchets de chantier du canton. Une cinquantaine d’emplois, socialement et écologiquement utiles, sont en jeu. Ils pourraient disparaître si la Sablière du Cannelet devait cesser ses activités. Si l’entreprise devait fermer – à moins que les autorités n’arrivent à lui trouver un nouveau terrain – ces déchets pourraient être exportés en France, pour y être recyclés puis ré-importés à Genève, ce qui constituerait une aberration écologique. Il est impossible de régulariser les activités de l’entreprise sans déclassement en zone industrielle. Alors, même si c’est légalement discutable, il faudrait tout de même le faire au nom du recyclage et de l’emploi. Selon les autorités, il n’existe pas de terrain disponible suffisamment grand dans une zone industrielle existante pour que l’entreprise puisse y déménager.
Mais il y a également de sérieux arguments en sens contraire. L’activité de recyclage implique des nuisances (passage de nombreux camions, poussière) et consomme beaucoup d’eau. Surtout, la transformation d’un terrain agricole en carrière, puis en zone de recyclage, s’est faite malgré les habitants, qui ont donc de bonnes raisons d’être mécontents. La politique du fait accompli est détestable. Ce que propose une majorité du Grand Conseil, ce n’est rien moins que la régularisation d’une activité illégale, ce qui est de nature à créer un dangereux précédent, et une incitation au grignotage de la zone agricole. Le Parti du Travail est profondément attaché au maintien de la zone agricole et contre son mitage, pour préserver la nature, et au nom de la souveraineté alimentaire. Les opposants pointent également le fait qu’il existe d’autres entreprises de recyclage dans le canton, qui auraient la capacité de traiter 100% des déchets de chantier, et que la Sablière du Cannelet a refusé de déménager lorsqu’un terrain de rechange lui avait été proposé (il y aurait donc bien des terrains disponibles), préférant poursuivre ses activités dans l’illégalité. Toutefois, en cas de NON, rien ne garantit la renaturation de ces trois hectares, ou leur retour à l’agriculture. Celui-ci prendrait en tout cas du temps. La préservation des emplois n’est pas garantie non plus.
L’Assemblée générale du Parti du Travail, qui devait prendre position sur les différents objets soumis en votation le 29 novembre, a estimé que la pesée du pour et du contre n’était pas évidente concernant cet objet. En majorité, elle décida de ne pas prendre position sur la question. Il importe toutefois de signaler que ce point fut débattu en profondeur. Une minorité significative vota pour le NON. En revanche, personne ne se prononça pour le OUI.
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