On s’en souvient, c’est le procès truqué intenté aux
communistes, accusés à tort de l’incendie du Reichstag, et où Georges Dimitrov
s’illustra par un courage admirable, qui fut le premier pas d’Hitler parvenu au
poste de chancelier d’Allemagne vers l’instauration d’une dictature totale.
Recep Tayip Erdogan, actuel président de Turquie avance à grand pas vers
l’instauration d’un régime présidentiel fort « à la turque » – pour
lequel il a explicitement cité le Reich hitlérien comme modèle, et qui ressemble
en effet de plus en plus à une dictature fasciste. Le 31 décembre 2015, dans
un discours télévisé, Recep Tayyip Erdogan il avait dit en effet : «Dans un
système unitaire (comme la Turquie), un système présidentiel peut
parfaitement exister. Il y a actuellement des exemples dans le monde et aussi
dans l’histoire. Vous en verrez l’exemple dans l’Allemagne d’Hitler.» Et, pour
parvenir à ce but, il utilise des moyens similaires : répression brutale
et procès truqués contre toute opposition, et tout particulièrement contre la
troisième force politique du pays, le HDP (Parti démocratique du peuple) –
large coalition rassemblant des organisations de gauche radicale et qui
défendent la cause du peuple kurde (dont nos camarades du SYKP – Parti de la
reconstruction socialiste).
Dans la nuit du 3 novembre, le régime d’Erdogan a
ainsi fait arrêter 13 députés et dirigeants du HDP, dont les deux co-présidents
Selahattin Demirtaş et Figen Yüksekdağ, ainis que 9
journalistes du quotidien d’opposition Cumhuriyet. Nos camarades arrêtés se voient accusés de
proximité avec le PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan, qui lutte à main
armée contre le régime d’Erdogan, mais aussi contre l’Etat islamique),
accusation habituelle contre tout opposant de gauche persécuté en Turquie. Ce
n’est là qu’un tour supplémentaire dans une longue spirale de répression et
d’arrestations arbitraires depuis le coup d’Etat raté du 15 juillet
dernier : purge massive dans l’armée et l’administration publique,
emprisonnement de journalistes, fermeture de médias non inféodés, guerre
meurtrière menée contre le peuple kurde et notamment le PKK (en Turquie ou à
l’extérieur, en Syrie et en Irak, appui direct et indirect à l’Etat islamique…Ce
avec la silence complice de l’Occident. L’accusation de sympathie, réelle ou
supposée, avec le PKK ou avec le prédicateur islamiste mais devenu adversaire
d’Erdogan Fethullah Gülen, sert de prétexte
à une véritable chasse aux sorcières, doublée de purges massives dans
l’administration, et fonctionnant sur la délation, dans le pays même et dans la
diaspora.
Les députés encore libres du HDP ont renoncé à siéger
au parlement turc, où la poursuite de leur combat est désormais rendue
impossible. Du reste, la lutte par des moyens légaux est désormais coupée au
HDP, dont le siège à Ankara est cerné par la police, et l’accès interdit. En
opérant cette rafle contre les élus et dirigents du HDP, ce ne sont pas
simplement les 6 millions d’électeurs qui avaient voté pour le Parti
démocratique des Peuples que le gouvernement d’Erdogan a décidé de rayer d’un
trait de plume, ce sont aussi, explique le parti, « les millions de citoyens
qui poursuivent la lutte pour la démocratie, la liberté, l'égalité, les droits
du travail, la libération et la justice des femmes » – combats qui concordent
peu avec l’agenda réactionnaire d’Erdogan, et qui expliquent sa haine du HDP et
de ce qu’il représente.
« Au cours de la dernière
année et demie, analyse le HDP, le gouvernement d’Erdoğan-AKP, a dévasté tout
le pays avec l’objectif de réaliser ce qu’il appelle un « régime présidentiel à
la turque ». Il a ainsi causé la mort, provoqué des blessures, ou le
déplacement et la perte d'emploi de milliers de personnes, ce qui a mené à une
augmentation de la tension et de la polarisation entre les gens dans le pays. »
Ce qui est présenté comme un régime présidentiel « à la turque », n’est rien
d’autre que la dictature d'un seul homme, « c'est le fascisme, et cela signifie
la guerre, l'oppression, l'agitation et la tyrannie, » résume le parti qui
propose de lutter contre l'oppression et la tyrannie, « non seulement pour le
peuple kurde, mais pour tous les peuples de la Turquie.» Le HDP entend
poursuivre la lutte, à l’extérieur du parlement et sans faillir. Quant à nous,
notre devoir est de soutenir autant qu’il nous est possible nos camarades dans
leur difficile combat contre le fascisme, pour la démocratie et la justice
sociale.
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