Il
n’a pas pu échapper à nos lecteurs que Nicolas Maduro a été réélu président de
la République bolivarienne du Venezuela le 20 mai 2018 avec 67,84% des voix,
tant les médias occidentaux de différentes obédiences en ont abondamment parlé.
Ils n’auront raisonnablement pas pu – à moins de vivre coupé du monde – ne pas
avoir entendu que le scrutin aurait été pour le moins problématique, si ce
n’est truqué, que le Venezuela vit une grave crise économique, qui serait
apparemment de la seule faute de son gouvernement, que les démocraties
occidentales s’inquiéterait avec raison des violations des droits humains au
Venezuela (mais bizarrement, beaucoup moins dans d’autres pays), que Maduro
serait un « dictateur », et d’autres propos du même acabit.
Les
sornettes ci-dessus évoquées ne représentent qu’un petit échantillon de la
guerre médiatique orchestrée par les USA contre la Révolution bolivarienne, et
à laquelle tous les médias bourgeois occidentaux participent assidûment. Alors
rétablissons quelques faits élémentaires. Nicolas Maduro, président de la
République bolivarienne du Venezuela, membre du Parti Socialiste Unifié du
Venezuela (PSUV), et successeur du défunt Hugo Chavez, a donc été réélu à sa
propre succession avec 67,84% des voix, au termes d’un scrutin bien organisé,
qui s’est déroulé dans le calme, et où plus de 150 observateurs internationaux
sérieux et qualifiés n’ont pas décelé d’irrégularités notables. Pourtant, on
nous affirme de toutes parts que le scrutin était irrégulier. Sur la base de
quoi ? L’absence des principaux partis de l’opposition de droite ?
Ces partis, divisés entre eux, en plein marasme depuis que leur tentative de
saboter les élections à l’Assemblée nationale constituante par la violence,
l’assassinat de militants chavistes et le saccage de bâtiments publics ait
échoué, ont refusé la main tendue et l’appel au dialogue du gouvernement
bolivarien (qui aurait pourtant eu amplement de quoi les éradiquer pour leurs
actions criminelles), et ont choisi d’appeler au boycott de l’élection
présidentielle. Pour l’opposition oligarchique vénézuélienne, seules sont
démocratiques les élections qu’ELLE gagne – intéressante vision de la
démocratie. Le problème est-il alors le taux de participation, seulement 46%,
soit moins de la majorité du corps électoral. Mais dans ce cas, il faudrait
annuler pratiquement tous les scrutins en Suisse ! Les votations de ce
dimanche 11 juin n’ont ainsi mobilisé que 33% du corps électoral de notre pays.
Quelqu’un envisagerait-il pourtant d’en annuler les résultats pour cette
raison ? Il suffit d’ailleurs de regarder le tableau qui illustre le
présent article pour constater que Nicolas Maduro est tout de même mieux élu
qu’Emmanuel Macron ou que Donald Trump, qui cherche, avec une véritable
hystérie, à le faire tomber.
Du
reste, que valent les scrupules démocratiques de la Maison blanche ? Il
suffit de répéter le mot suivant de Julian Assange pour en dire tout ce qu’il y
a à en dire : « Je ne comprends pas pourquoi Maduro n’adopte pas la
constitution de l’Arabie Saoudite pour satisfaire les Etats-Unis ». Ce qui
vaut pour les USA vaut également pour toutes les démocraties impérialistes
occidentales. La Suisse ne fait pas exception.
Non,
si la classe dirigeante étatsunienne, ainsi que tous ses alliés et satellites,
haït à ce point le Venezuela bolivarien, c’est pour la même raison qu’elle
continue aujourd’hui encore de porter la même haine à la République de Cuba et
à sa Révolution : parce que la Révolution bolivarienne s’est fixée
l’objectif – criminel au yeux des impérialistes – de ne plus être
l’arrière-cour des USA, de sortir de l’orbite de l’Empire, de reconquérir sa
souveraineté, la maîtrise de ses ressources naturelles et la dignité de son
peuple, plutôt que de livrer les deux à la merci des multinationales étatsunienne,
d’édifier, enfin, une société socialiste. C’est pour la raison inverse que les
USA ont installé et accordé un soutien inconditionnel à l’infâme dictature de
Pinochet, et qu’ils ne trouvent rien à reprocher à l’obscurantiste et
tyrannique monarchie saoudienne. C’est pour des raisons semblables que les
autres démocraties occidentales s’alignent, globalement, sur les mêmes
positions. La démocratie et les droits humains n’ont rien à voir là-dedans.
Cela
n’est pas sans rapport avec les graves difficultés économiques que connaît
actuellement le Venezuela. La presse bourgeoise parle abondamment de ces
difficultés, mais réussit l’exploit à ne jamais en évoquer l’aspect
essentiel : le Venezuela est actuellement victime d’une véritable guerre,
non seulement informationnelle, mais aussi et surtout économique, orchestrée
par les USA, avec le soutien des autres « démocraties » occidentales,
et la collaboration active de l’oligarchie vénézuélienne et de la fameuse
opposition, qui ne représente que ladite oligarchie.
N’ayant
pas réussi à renverser le président démocratiquement élu Hugo Chavez, les USA
pensaient enfin tenir leur chance après son décès, il y de cela 5 ans. Du fait
de l’influence conjuguée des difficultés de la Révolution et des moyens énormes
investis par les USA, l’opposition oligarchique obtenait une courte majorité
aux élections législatives en 2015, mais sans disposer d’une majorité qualifiée
qui lui eût permis de déposer le président Nicolas Maduro. Toutefois, la dite
opposition s’est complétement isolée et discréditée elle-même, par son
revanchisme et sa haine quasi-pathologique des classes populaires qui ont osé
secouer leurs chaînes, par son revanchisme hystérique, par son intelligence
avouée avec l’Empire. La Révolution bolivarienne sut se sortir de ses
difficultés, et de défaire la tentative de contre-révolution, à la fois dans la
rue et au travers de l’élection de l’Assemblée nationale constituante. Depuis,
n’ayant pas réussi à saboter cette élection malgré sa campagne criminelle de
violences et d’intimidations, l’opposition vénézuélienne est en déroute
complète.
L’Empire a réagi à cette victoire de la
Révolution bolivarienne par un politique de « sanctions »
draconiennes, en réalité une véritable guerre économique, destinée à étouffer
l’économie vénézuélienne, à faire sombrer le Venezuela dans la crise, dans
l’espoir de briser sa révolution. Donald Trump a ainsi signé, le 22 mai, un
nouveau « décret présidentiel » qui durcit l’embargo financier et commercial
sur le Venezuela. Aucune personne ou entité étatsunienne ne peut acheter des
titres de la dette souveraine du pays, des actifs ou des biens du gouvernement
vénézuélien aux Etats-Unis ou appartenant à une entité vénézuélienne dans
laquelle l’Etat est présent à hauteur de 50 % (visée ici PDVSA, la compagnie
pétrolière nationale). Le Venezuela se voit ainsi menacé de difficultés pour
exporter son pétrole (alors que son économie en dépend largement, la Révolution
bolivarienne n’ayant guère réussi à ce jour à sortir le pays de sa dépendance à
l’exportation de pétrole). Ces mesures de boycott ont un effet désastreux sur
l’économie d’un pays tel que le Venezuela, qui est un importateur net, ne
possédant ni une autosuffisance alimentaire, ni une production industrielle
suffisamment importante et diversifiée (malgré de réelles avancées, la
Révolution bolivarienne n’a pu liquider l’héritage pourri des gouvernements de
droite antérieurs). Elles expliquent aussi pourquoi il n’est pas aussi facile
qu’il n’y pourrait paraître de nationaliser plus largement au Venezuela les
secteurs qui pourraient – et devraient – l’être.
Ce
boycott mis en place par les USA, et transposé sous une forme ou une autre par
d’autres Etats occidentaux, est particulièrement aggravé par le sabotage
organisé par l’oligarchie vénézuélienne, qui garde à ce jour largement le
contrôle du commerce extérieur et de la grande distribution – hausse
vertigineuse des prix, pénuries artificiellement créées, réexportations
illégales vers la Colombie…La Colombie qui a récemment adhéré à l’OTAN, afin de
faciliter l’intervention militaire impériale dans la région.
La
Révolution bolivarienne parvient néanmoins à résister face à cette offensive
hostile, et même à aller de l’avant, malgré d’inouïes difficultés. Le président
Maduro a ainsi défini, après sa réélection, six axes pour la nouvelle étape de
la Révolution : la réconciliation nationale, la restauration de la
croissance économique – à travers la main tendue envers le secteur privé,
capitaliste, mais aussi par le renforcement des Comités Locaux d’Approvisionnement
et de Production (CLAP) –, la lutte contre la corruption, la défense du pays,
et le socialisme comme objectif stratégique.
Un
regard gauchiste pourrait voir dans ces mesures – réconciliation nationale,
main tendue à la bourgeoisie nationale, hausse de la production pétrolière – un
tournant à droite de la Révolution. Il est vrai que ces mesures ne peuvent être
efficaces que si elles sont temporaires. Mais il faut être conscient des
difficultés auxquelles la Révolution bolivarienne doit faire face. Quand on
sait quel est le coût matériel et humain d’une guerre civile – qui en outre
serait le prétexte rêvé pour une intervention des USA – on ne peut que
comprendre les efforts du gouvernement bolivarien pour la réconciliation
nationale (stratégie qui a en outre été particulièrement efficace pour mettre
l’opposition devant ses contradictions, l’isoler, la désorganiser et finalement
la mettre en déroute). On comprend aussi l’urgence de rétablir la situation
économique ; du reste, le Parti bolchevik avait aussi mis en place la NEP
pour de telles raisons. Enfin, la critique ou le doute sont toujours facile,
mais le devoir pour tout internationaliste qui se respecte est aujourd’hui
celui de la solidarité sans failles avec la Révolution bolivarienne.
Pour
conclure par des paroles de Noam Chomsky, datées du 13 août 2017, et auxquelles
nous souscrivons entièrement : « Les Etats-Unis ont déjà envahi le
Venezuela avec des groupes subversifs comme la National Endowment for Democracy
– NED, qui soutiennent une opposition qui cherche le renversement violent d’un
gouvernement élu : un crime de haute vertu du droit international. Il est
peu probable que les Etats-Unis envahissent le Venezuela. Washington n’envahit
que les pays sans défense, et le Venezuela n’est pas sans défense. Le monde
décent devrait soutenir le Venezuela, maintenant soumis à une guerre de propagande
virulente à travers les médias. Si le Venezuela tombe, l’humanité entière
tombe ».
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