C’est plus de 50 ans
d’agression impérialiste des USA contre la République de Cuba qui semble sur le
point de se terminer. Il faut saluer tout d’abord la libération de tous les
« Cuban Five », ces héros cubains chargés d’enquêter sur des groupes
terroristes d’extrême-droite préparant des attentats contre Cuba depuis la
Floride, et pour cela incarcérés pendant de longues années aux Etats-Unis suite
à une procédure judiciaire dont l’irrégularité était flagrante. Suite à la
libération par la République de Cuba d’Alan Gross, espion américain engagé dans
des activités subversives visant au renversement du gouvernement cubain, les
USA ont accepté d’enfin libérer Gerardo Hernández, Antonio Guerrero et Ramón
Labañino, après 16 ans de détention injuste (Fernando González et René
González avaient déjà étaient libérés auparavant après avoir purgé l’entièreté
de leur peine). C’est donc un long combat contre une injustice flagrante
perpétrée par l’impérialisme étatsunien qui s’achève par une victoire.
Ensuite, la normalisation
des relations entre les deux pays. Raoul Castro et Barack Obama ont annoncé le
17 décembre 2014 l’intention de rétablir les relations diplomatiques entres les
deux pays et de rouvrir leurs ambassades respectives. Les USA ont d’ores et
déjà levé certaines restrictions commerciales, de voyage et concernant le
transfert de fonds. Ceci dit, le blocus illégal au regard du droit
international et des décisions de l’ONU (chaque année, à l’Assemblée générale
de l’ONU, 188 pays votent pour exiger la levée du blocus, contre les seules
voix des USA et d’Israël, et trois abstentions…mais du droit international, les
USA n’en n’ont cure), assassin et absurde pratiqué depuis plus de 50 ans
avec des conséquences
catastrophiques sur l’économie cubaine reste toujours en vigueur, étant donné
qu’il est inscrit dans des lois que seul le Congrès peut abroger, le président
n’en ayant absolument pas la compétence.
Un blocus scandaleux et illégal
Rappelons que ce blocus
interdit tout échange commercial ou presque entre Cuba et les Etats-Unis (ce
qui a été en soi un choc très dur pour l’économie cubaine, puisque, pour des
raisons géographiques évidentes, avant la Révolution 73%
des exportations cubaines étaient destinées aux États-Unis et 70% des
importations provenaient de ce même pays). De plus, après le renversement du
socialisme en URSS, les USA ont encore durci le blocus, espérant ainsi détruire
aussi le socialisme à Cuba. Ainsi, une entreprise, qu’elle soit étatsunienne ou
non, si elle veut opérer sur le territoire des USA, a l’interdiction stricte
d’entretenir le moindre rapport commercial avec Cuba, sous peine de lourdes
sanctions pour violation du droit étatsunien. Un pâtissier français qui
souhaiterait exercer aux USA doit prouver que sa marchandise ne contient pas un
seul gramme de sucre cubain. Parfois,
des sommets de l’absurde sont atteints : un citoyen étatsunien qui aura bu
un verre de rhum cubain ou fumé un cigare cubain à l’occasion d’un voyage dans
un pays où de tels produits sont légaux peut être condamné à une peine de
prison ferme à son retour. Et Cuba doit se passer de toutes les innovations
médicales qui sont brevetées aux USA, ce qui représente quand même près de 80%
des brevets déposés ces dernières années.
Des représentants de
l’extrême-droite fasciste cubano-américaine de Miami ont immédiatement exprimé
leur opposition, éructant une nouvelle fois toute leur haine contre Cuba et son
peuple qui refuse de subir une nouvelle fois le joug néocolonial. Néanmoins, le
patronat étatsunien, des grandes entreprises, le lobby agricole, nombre de
sénateurs démocrates comme républicains, et des anciens présidents, et non des
moindres, ont réclamé avec force la levée du blocus. On peut donc espérer que
cette injustice flagrante envers la République de Cuba et son peuple aura
bientôt pris fin.
Une victoire historique de la Révolution
Les commentateurs de la presse
bourgeoise se sont unanimement empressés de multiplier les éloges à l’égard
d’Obama et de sa volonté d’ouverture. Or, ce que cette analyse au
ras-les-pâquerettes passe complétement sous silence, c’est que ce tournant
constitue avant tout une victoire historique pour la Révolution cubaine, et
d’un aveu d’échec de l’impérialisme étatsunien. Malgré plus de 50 ans de blocus
étouffant, d’attentats terroristes organisés avec le soutien de la CIA, et une
intense activité de subversion sur le sol cubain, les USA n’auront pas réussi à
briser la détermination du peuple cubain, n’auront pas réussi à renverser le
socialisme à Cuba.
Le changement de cap d’Obama
ne constitue que l’aveu de l’inutilité de ce blocus qui n’a pas atteint ses
objectifs et n’aurait pas pu les atteindre. Nous rappelons aussi que cela fait des années qu’une campagne
internationale est menée pour exiger du président des USA qu’il accorde la
grâce présidentielle aux « Cuban Five », dont il ne pouvait pas ignorer l’illégalité de la
détention. Il s’y est toujours refusé, et ce, sans aucune raison valable.
Raoul Castro a déclaré
notamment à l’occasion : « L’héroïque peuple cubain a démontré, face
aux grands périls, les agressions, adversités et sacrifices, qu’il est et saura
rester fidèle à ses idéaux d’indépendance et de justice sociale. Au cours de
ces 56 années de Révolution, nous sommes restés unis et nous avons gardé une
profonde loyauté pour ceux qui sont tombés en défendant ces principes depuis le
début de nos guerres d’indépendance en 1868.
Maintenant, nous sommes en
train d'œuvrer, malgré les difficultés, à l’actualisation de notre modèle
économique pour bâtir un socialiste prospère et durable ».
L’actualisation du modèle économique cubain
Il faut dire qu’il est
difficile de n’établir aucun lien entre le changement de politique des
Etats-Unis et l’actualisation de son modèle économique opéré par la République
de Cuba. Si le patronat, le lobby agricole et des députés de droite du Congrès
des USA ont réclamé la levée du blocus, ce n’est certainement pas parce qu’ils
auraient enfin éprouvé quelques remords pour un demi-siècle d’embargo criminel,
mais parce qu’ils pensent avoir trouvé un nouveau marché intéressant suite à
l’actualisation du modèle économique cubain lancée par le VIème
Congrès du Parti communiste de Cuba (PCC) en avril 2011 et poursuivi avec
prudence mais aussi sans retard depuis. Or, cette série de réformes, dont le
but principal est d’accroître la productivité et l’efficacité de l’économie
cubaine, prévoit notamment l’ouverture au marché et à l’entreprise privée de certains
secteurs de l’économie jugés non-stratégiques, notamment le tourisme et les
services. Une libéralisation partielle de l’agriculture a aussi été implémentée.
Et des mesures ont été prises pour ouvrir certains secteurs de l’économie aux
investissements directs étrangers. Le patronat étatsunien a immédiatement
flairé un nouveau débouché pour ses exportations et ses investissements.
On peut aussi craindre que
l’administration Obama n’ait pas renoncé quant au fond à son objectif de
renverser le socialisme à Cuba, mais qu’il a plutôt changé de méthode, espérant
que l’invasion des produits et des investissements étatsuniens pourra réussir
là où le blocus et les attentats ont échoué. C’est un risque évident que prend
le PCC en acceptant d’ouvrir certains secteurs de l’économie au privé et aux
investissements étrangers. D’aucuns des commentateurs de la presse bourgeoise
croient déjà flairer un possible rétablissement du capitalisme à Cuba.
Heureusement, le PCC est plus qu’eux conscient des risques qu’impliquent les
réformes en cours et est déterminé à préserver le caractère socialiste du pays.
S’il était nécessaire d’ouvrir certains secteurs de l’économie au marché pour
améliorer le bien-être du peuple cubain et sortir enfin de la longue période de
difficultés qui a suivi l’effondrement du camp socialiste, de faciliter les
investissements étrangers afin de favoriser le développement du pays,
d’instaurer un modèle de « socialisme avec le marché » (et non pas un
« socialisme de marché », la distinction est importante), les
secteurs stratégiques de l’économie ne sont en rien concernés et demeureront
intégralement socialistes, c’est-à-dire au mains de la collectivité et régis
selon le plan et non le marché. N’en déplaise à tous les plumitifs libéraux et
agents de l’impérialisme, Cuba reste et restera un bastion du socialisme et un
phare pour les peuples en lutte pour leur émancipation.
Par ailleurs, il faut rester
vigilants par rapport à un autre aspect. Il est en effet à craindre que
l’impérialisme étatsunien sur le déclin ne fait que renoncer à des objectifs
qui n’ont pas ou plus d’importance stratégique majeure, afin de mieux déployer
ses forces ailleurs. C’est en ce sens qu’il faut comprendre le « pivot
vers l’Asie » initié par Barack Obama. Tant que l’impérialisme existe, il
restera agressif et continuera de menacer la paix mondiale. Cela, nous ne
devons jamais l’oublier. Tant que l’impérialisme existera, nous devrons le
combattre, et ne pas nous laisser bercer par les belles paroles de ses
représentants du moment.
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