Le
25 septembre prochain, nous sommes appelés à nous prononcer sur la nouvelle loi
fédérale sur le renseignement (LRens). La majorité de droite au pouvoir, mais
aussi une partie de « gauche » gouvernementale, appelle à voter OUI,
avec des arguments lénifiants, disant que cette loi serait parfaitement modérée
et raisonnable, ne viserait qu’à garantir notre sécurité, et que personne à
part les terroristes n’en serait lésé. Notre Parti a, au contraire, soutenu le référendum,
et avec raison.
Selon
cette loi, en effet, le service de renseignement de la Confédération (SRC)
devrait pouvoir surveiller les communications de manière élargie (écoutes
téléphoniques, lectures de courriels et de courriers) et observer des faits
dans des lieux privés, notamment en posant des micros, y compris dans des
logements privés. De plus, il devrait être possible de perquisitionner
secrètement des systèmes informatiques et d’y installer des chevaux de Troie.
En d’autres termes : si la loi passe, les services de renseignement
pourraient à l’avenir pénétrer dans la sphère privée des citoyens, et ce, en
l’absence de délit suspecté. Et s’il est vrai qu’un juge du Tribunal fédéral
administratif devrait donner son approbation à de telles mesures, il ne
disposera pour ce faire que de la version donnée par le SRC.
Nous
n’avons aucun doute sur le fait que cette révision de la loi n’ait nullement
pour but exclusif de combattre la « menace terroriste », mais vise
avant tout toute contestation de l’ordre établi. Nous n’oublions pas en effet
que le SRC vient d’un regroupement de la police fédérale avec le
contre-espionnage. Or la police fédérale a toujours été la police politique de
la grande bourgeoisie suisse, dont l’une des tâches principales était de ficher
les militants du Parti du Travail, de défendre l’ordre établi contre quiconque
le conteste. Nos adversaires prétendent que les leçons ont été tirées du
scandale des fiches et jurent que jamais pareille chose ne se reproduirait.
Vraiment ? C’est là se moquer du monde ! Oublie-t-on qu’on a
récemment appris que le SRC continue de ficher près de 200'000 personnes pour
leurs opinions politiques ? Révélation que a été faite dans l’indifférence
générale. Oublie-t-on que l’« extrémisme de gauche » n’est pas loin
d’être considérée comme la principale menace pour le pays dans le rapport
annuel du DDPS ? Ce n’est du reste que très logique. Les services secrets
d’un Etat bourgeois sont par définition une émanation dudit Etat, un Etat de
classe dont la vocation première et de maintenir la domination de classe de la
grande bourgeoisie. Les services secrets, par leurs pouvoirs étendus, par le
secret qui les entoure justement, constituent l’aspect le plus dangereux de cet
Etat, car pratiquement soustraits à tout contrôle populaire possible. Aux USA
ils ont même évolué en un véritable Etat dans l’Etat.
Pour
voir clairement la direction dans laquelle la classe dirigeante de notre pays
veut nous mener, il suffit de regarder l’exemple de deux pays, lest USA et la
France, qui ont mis en place des lois similaires à la LRens bien plus tôt. Les
USA ont mis en place le Patriot Act sous la présidence de George W. Bush, et la
France toute une série de lois sécuritaires sous le quinquennat de Nicolas
Sarkozy, dans les deux cas au nom de la « sécurité ». Ces deux pays
n’en sont pas devenus plus sûrs. Les dispositions extraordinaires offerts aux
« forces de l’ordre » n’y ont guère permis d’empêcher d’attentats, et
aux USA c’est la police qui tue presque quotidiennement des citoyens, la
plupart du temps afro-américains, arbitrairement et impunément. En revanche, ce
sont les droits fondamentaux des citoyens de ces pays qui sont remis en cause,
de l’habeas corpus à la présomption
d’innocence, au point de les faire glisser doucement vers la dictature. Le
débat actuel en France, vivant sous le régime de l’état d’urgence, sur les
« fiches S » est tout à fait révélateur. Pour être fiché S, un simple
soupçon d’un seul policier suffit. Aujourd’hui, on débat sérieusement quant au fait
s’il ne faudrait pas interner celles et ceux qui sont fichés S dans des camps,
indéfiniment et sans procès.
Un
des fondateurs du libéralisme classique, Benjamin Franklin, avait dit «
toute société qui renoncerait à un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mériterait
ni l’un ni l’autre et finirait par perdre les deux ». Mais aujourd’hui que
son régime est en crise et sa domination tendanciellement menacée, la
bourgeoisie jette la bannière des droits individuels fondamentaux, exception
faite du seul droit de propriété, par dessus bord, et compte sur des formes de
plus en plus avouées de dictature pour se maintenir au pouvoir. Cette bannière
de la liberté, c’est à nous qu’il revient de la porter aujourd’hui. Ainsi que
l’a dit Edward Snowden, traqué par le bras armé de la bourgeoisie étatsunienne
pour avoir confirmé au monde la réalité et l’étendue de son système de
surveillance : « Prétendre que votre droit à une sphère privée n’est
pas important parce que vous n’avez rien à cacher n’est rien d’autre que de
dire que la liberté d’expression n’est pas essentielle car vous n’avez rien à
dire ». Pour
que la Suisse ne devienne pas une dictature policière, ce sera résolument NON à
la LRens !
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